Le coût humain de la rentabilisation du domaine social

Burn Out, Stress Travail et Santé

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Comment préserver la santé des professionnel·le·s du secteur médico-social dans un contexte d’optimisation des tâches et d’accélération ? Le temps de voir émerger des changements organisationnels et politiques qui soutiennent la santé au travail, chacun·e est amené·e à prendre des mesures de prévention au quotidien.

Les métiers du secteur médico-social sont en pleine métamorphose. En effet, rentabiliser les prestations génère de nouvelles exigences en matière d’immédiateté et d’attentes collectives. L’objectif est « d’économiser », chaque année « des drames humains », des complications ou de réduire la longueur des hospitalisations. L’indicateur de performance a pour but d’optimiser l’efficacité des prises en charge en fonction du budget attribué mais il a tendance à dénaturer le sens du travail, chaque tâche devenant un objectif à atteindre coûte que coûte dans un temps donné.
L’effet secondaire de ce système économique est l’augmentation des tâches administratives pour justifier l’investissement des moyens financiers. Ce travail se fait au détriment du temps passé auprès des bénéficiaires, les professionnel·le·s ont tendance à se mettre la pression pour réussir à satisfaire les exigences des financeurs et maintenir, malgré tout, la qualité d’accompagnement en moins de temps.
Pour les travailleuses et travailleurs de terrain, formés à avoir des initiatives pour le bien de la personne, la mue du sens au travail est radicale. Aujourd’hui, ils ne peuvent plus se fier uniquement à leur expertise pour prendre des décisions adaptées à chaque situation. Ils se doivent d’atteindre des objectifs chiffrés décidés par d’autres avec des moyens formatés par des budgets pré-établis.  De plus, la logique de performance et de rentabilité encourage l’action à court terme, alors que, par exemple, l’accompagnement d’une famille dysfonctionnelle, la prise en charge d’une personne en situation de handicap ou le maintien d’une personne âgée à domicile sont des processus longs et complexes. Il n’y a souvent aucun résultat significatif rapidement.
Comment préserver la santé des professionnel·le·s du secteur médico-social dans un contexte que certaines interprètent comme une « zone sinistrée » ? Le temps de voir émerger des changements organisationnels et politiques qui soutiennent la santé au travail, chacune et chacun est amené à prendre des mesures de prévention au quotidien.

La nécessité de prendre soin de soi en priorité

Dans un avion, les directives d’urgence pour sauver un bébé sont : « le parent prend d’abord de l’oxygène avant de mettre le masque sur son enfant ». Le parent est prioritaire et c’est vital pour lui comme pour son petit. De façon similaire, un travailleur social dont le rôle est d’aider des personnes vulnérables en souffrance, doit d’abord prendre soin de lui. Impossible de soigner ou d’accompagner les gens de façon adéquate sans veiller scrupuleusement à sa santé physique et psychique !

Comprendre ce qu’est le burn-out

Plus les travailleuses et travailleurs médico-sociaux sont informés et plus ils pourront être vigilants. Le burn-out n’est pas un état qui apparaît subitement. Généralement, l’épuisement s’installe au-delà de 6 mois de stress chronique. Ce processus s’entraîne de lui-même : le stress permanent augmente la tension, le corps se fatigue, le sommeil est perturbé, la récupération est difficile, l’efficacité au travail diminue, les heures supplémentaires augmentent pour compenser, ce qui crée davantage de fatigue.

Identifier les signaux d’alerte

Concrètement, chacune et chacun doit être attentif à son état physique, émotionnel et mental. Les signaux qui devraient alerter sont : une fatigue de tension, une irritabilité accrue, des inquiétudes, une démotivation mais également la rumination de soucis professionnels qui envahissent la vie privée et empêchent de se changer les idées et de bien dormir. Le stress chronique provoque une vision systématique des difficultés et non des solutions ce qui développe un sentiment de ras-le-bol ou d’impuissance. Dépasser les limites, entrer dans une zone à risque, est habituel pour des travailleurs engagés. L’important est de s’en rendre compte et de mettre en place des mesures de protection au bon moment.

Kit de survie en zone de danger

Si les signaux d’alerte se sont installés, la priorité consiste à se ressourcer davantage. Pour ce faire, protéger son sommeil est primordial. Se défouler et se changer les idées est aussi prioritaire. Au travail comme dans la vie privée, il est conseillé de se concentrer sur les situations où il est possible d’agir plutôt que se focaliser sur les difficultés. Un des points qui fait une grande différence est de cadrer les ruminations toxiques, surtout dans la vie privée.

Maintenir une vie privée solide et sortir du rôle d’aidant

Le plus grand danger ? Les préoccupations professionnelles mangent peu à peu la vie personnelle et les opportunités de se ressourcer s’amenuisent. Notre pouvoir de récupération tient en priorité à la vie hors travail : veiller à avoir une vie privée enrichissante et à « déconnecter » complètement du rôle d’aidant.

Évacuer ses émotions sainement

Assurer une attention constante et bienveillante implique d’être en bonne santé physique et psychique. La résonnance émotionnelle est l’outil principal pour travailler avec empathie et assurer une présence humaine. L’hygiène émotionnelle est vitale pour les professionnels du secteur médico-social ; il s’agit d’évacuer régulièrement ses émotions, se défouler, bien connaître son fonctionnement, être conscient des problématiques susceptibles d’entrer en résonance avec son propre vécu et savoir poser des limites.

Garder le sens de son travail vivant

La première étape indispensable est de ne pas subir mais d’accepter les indicateurs de performance qui constituent le nouveau paysage du secteur médico-social. Entrer en opposition, résister, signifie investir et gaspiller son énergie dans un gouffre sans fond ! Il s’agit d’adopter une attention sélective : injecter du sens chaque jour dans les actes du quotidien, garder à l’esprit les indicateurs précis qui montrent la qualité du travail social en fonction des valeurs professionnelles. Recueillir l’auto-évaluation de l’aidé et valoriser une stratégie des « petits pas ».

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