La chronique de Francis Kessler, Maître de conférences à l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne, révèle les nombreuses conditions nécessaires pour mener à bien une enquête sur une salariée victime de harcèlement moral ou sexuel.
La mécanique de la preuve du harcèlement moral ou sexuel est décrite dans l’article L. 1154-1 du code du travail. Ce texte indique que le salarié doit présenter des faits pouvant laisser supposer l’existence d’un harcèlement. La jurisprudence vient d’ajouter que des éléments obtenus par le salarié par des moyens déloyaux, tel un enregistrement clandestin, sont admissibles (Cass. soc. 17 janvier 2024, n° 22-17.474).
Il incombe alors à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement. Le plus souvent, une enquête interne à l’entreprise est ouverte, même si la Cour de cassation vient de juger que ce n’est pas une obligation et qu’il suffit que l’employeur ait « pris les mesures suffisantes de nature à préserver la santé et la sécurité de la salariée » (Cass. soc. 12 juin 2024, n° 23-13.975).
Il n’existe pas de cadre normatif strict pour conduire une telle enquête. L’employeur dispose seulement d’un guide du ministère du travail, « Harcèlement sexuel et agissements sexistes au travail : prévenir, agir, sanctionner », qui date de mars 2019 et d’un autre guide, celui du Défenseur des droits, intitulé « Le harcèlement discriminatoire au travail ».
Parfois des normes internes complétant le règlement intérieur, dénommées chartes d’éthique, codes de déontologie ou codes de bonne conduite, peuvent donner des indications pour organiser l’enquête. Le plus souvent, toutefois, ces textes ne font qu’énumérer des préceptes qui miment ceux, légaux, qui gouvernent l’enquête judiciaire : impartialité, indépendance, neutralité, confidentialité et loyauté.
Mission impossible ?
Et ces ressources peuvent être contredites. Ainsi, le guide ministériel indique que le rapport d’enquête interne n’a pas à être transmis au salarié. Cette solution a été reprise par certaines juridictions (CA Toulouse, 19 janvier 2024 RG n° 23/02401 et CA Versailles, 8 février 2024 RG n° 22/02170), quand d’autres considèrent que la communication de ce rapport [au salarié] était nécessaire (CA Paris, pôle 1 ch. 5, 18 janvier 2024, n° 23/15208).
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