La justice bouleverse le modèle d'Uber en requalifiant ses chauffeurs en salariés

Dans la Loi

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Dans un arrêt publié mercredi, la Cour de cassation considère qu’un chauffeur Uber ne peut être considéré comme un travailleur indépendant, et doit être requalifié comme salarié. La décision, qu’elle vient de publier sur son site, va faire jurisprudence et avoir des conséquences pour le modèle économique de tous les opérateurs de plateformes.

Après le pavé dans la mare, le coup de tonnerre. Il y a un an, la Cour d’appel de Paris avait requalifié en salarié un chauffeur VTC travaillant pour Uber. Saisie par la plateforme de transport, la Cour de cassation a confirmé ce mercredi cette décision. « Lors de la connexion à la plateforme numérique Uber, il existe un lien de subordination entre le chauffeur et la société. Dès lors, le chauffeur ne réalise pas sa prestation en qualité de travailleur indépendant mais en qualité de salarié », précise la plus haute juridiction civile dans un communiqué.

Concrètement, cela signifie que le contentieux à l’origine de cette bataille est du ressort de la justice du travail et non de la justice commerciale et devra donc être examiné par le Conseil de prud’hommes de Paris, qui l’avait refusé initialement. Mais les conséquences de l’arrêt du 4 mars 2020 vont au-delà de ce cas particulier.

Un arrêt traduit en anglais et en espagnol

La portée de l’arrêt Uber du 4 mars 2020 sur les travailleurs de plateforme est bien plus importante que celle du premier arrêt de la Cour sur le sujet en date du 28 novembre 2018 , qui concernait Take eat easy. Ce cas était si caricatural (avec un bonus-malus donnant le tournis) que la décision de l’époque avait constitué un avertissement aux plateformes mais n’excluait pas une appréciation au cas par cas des contrats conclus entre une plateforme et un travailleur en fonction du degré de contraintes. Au contraire de cet arrêt – publié sur le site de la Cour de cassation ce qui montre son importance – qui pose des principes et donc crée une jurisprudence. Première haute juridiction à se prononcer en Europe, elle a pris soin de le traduire en anglais et en espagnol, envoyant ainsi un signal à ses homologues appelés à se prononcer.

« Jurisprudence constante »

« L’existence d’un contrat de travail peut […] être établie lorsque ces personnes fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard du donneur d’ordre », affirme la Cour de cassation. Elle renvoie sur ce point à sa « jurisprudence constante » sur le lien de subordination qui est « caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ».

Et en l’espèce, c’est ce que constatent les juges : « Loin de décider librement de l’organisation de son activité, de rechercher une clientèle ou de choisir ses fournisseurs, [le chauffeur Uber qui a porté plainte] a intégré un service de prestation de transport créé et entièrement organisé par la société Uber BV, qui n’existe que grâce à cette plateforme service de transport à travers l’utilisation duquel il ne se constitue aucune clientèle propre, ne fixe pas librement ses tarifs ni les conditions d’exercice de sa prestation de transport qui sont entièrement régis par la société Uber BV ». Celle-ci dispose également d’un « pouvoir de sanction », y compris en cas de simples « signalements de comportements problématiques par les utilisateurs ».

Lire la suite, « Multiplication des contentieux », sur le site www.lesechos.fr/

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