10 ans après, le déni et l’absence de compassion des dirigeants sont intacts. Seule la justice apportera aux victimes et aux salariés la reconnaissance de la violence subie et permettra d’engager le travail de reconstruction dont l’entreprise a besoin.
Il y a trois catégories de prévenus: les trois dirigeants principaux de l’époque -l’ancien PDG Didier Lombard, son bras droit Louis-Pierre Wenès et le DRH Olivier Barberot-, quatre complices, et la personne morale qu’est l’entreprise France Télécom, devenue Orange.
Révoltant pour les victimes, le système de défense des dirigeants est le même au procès qu’à l’époque. Le déni de l’existence d’une crise sociale est maintenu, conjugué à une théorie complotiste. L’affaire France Télécom serait tout bonnement un complot médiatico-syndicaliste.
Si en tant que personne morale l’entreprise peut être considérée comme coupable, elle a surtout été instrumentalisée par les dirigeants de l’époque. Elle est un bien commun qui a souffert de leurs agissements. Les 22.000 départs ne visaient pas à sauver l’entreprise de la dette, mais à faire monter le cours de l’action pour mieux se rémunérer.
Lorsque les faits rappelés au Tribunal démontrent un management pathologique, les dirigeants se défaussent: “c’est pas nous!” mais l’encadrement local, qui n’aurait pas suivi leurs instructions. Ils tentent de faire croire que la situation a pu leur échapper par incompétence, et que l’incompétence managériale ne vaut pas condamnation pénale. Comment peut-on se revendiquer à la fois sauveur et incompétent managérial? Où est la vérité?
Mais dans leur tentative désespérée de réécrire l’histoire, les prévenus se sont heurtés à un dossier d’instruction de 1 million de pages et à une Présidente d’audience remarquable qui a pointé leurs contradictions en s’appuyant sur les documents remontés par l’enquête et les perquisitions menées pendant les 5 années de l’instruction, le film de Serge Moati et des interviews de l’époque.
La dette de France Télécom, liée à des acquisitions malheureuses dont la valeur s’est effondrée au moment de la bulle internet, avait été jugulée par Thierry Breton. Lorsque Didier Lombard a repris les rênes de l’entreprise, la situation était assainie, France Télécom faisait des bénéfices… et dès 2006, versait 3 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires. Avec 21 milliards de dividendes versés en 6 ans de présidence Lombard, peut-on soutenir que l’entreprise était en difficulté?
Les 22.000 départs ne visaient donc pas à sauver l’entreprise de la dette, mais plutôt à faire monter le cours de l’action sur les marchés financiers et mieux se rémunérer. Au même moment, les dirigeants s’attribuaient des stock-options et des parts variables conséquentes. Ne restait plus qu’à mettre en marche une stratégie sur mesure pour y parvenir. Suppressions de services, mobilités forcées et augmentations salariales à zéro faisaient partie du plan, pour que les personnels aient envie de partir.
Nous demandons que la totalité des dommages et intérêts soient payés par les dirigeants mis en cause. Ils ont eu à cette époque des salaires extravagants et attribué 25 millions de stock-options. Didier Lombard touchait en moyenne 1,5 millions d’euros par an en salaire, il a reçu une retraite chapeau totale de 7 millions. On imagine mal qu’il n’ait que 15.000 euros d’amende.
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