Du fait de leur situation dominante sur le marché du travail, on observe rarement la situation comparée des hommes et des femmes du point de vue des hommes, ce qui n’est pourtant pas sans intérêt. Les hommes occupent toujours les meilleurs postes. Même si beaucoup reste à faire, les choses évoluent en faveur des femmes.
Au cours des dernières décennies, l’économie a créé beaucoup plus d’emplois féminins que masculins. Entre 1985 et 2015, le nombre total d’emplois a progressé de 3,5 millions, répartis en 300 000 emplois masculins et 3,2 millions emplois féminins. A partir de 2008, l’emploi féminin ne progresse plus guère du fait de l’ampleur de la crise, mais c’est un phénomène que les hommes connaissent depuis trente ans.
Plusieurs facteurs expliquent cette évolution. Premièrement, l’emploi des hommes diminue du fait de la poursuite du déclin de l’emploi industriel très masculinisé. Le nombre d’emplois d’ouvriers non qualifiés a baissé de 800 000 entre 1985 et 2015, soit – 40 %. L’emploi des femmes se développe davantage dans une société où les services continuent leur expansion.
Deuxièmement, le niveau de diplôme des hommes qui exercent un emploi a augmenté, mais beaucoup moins vite que celui des femmes. En 1985, 7,8 % des emplois masculins étaient d’un niveau supérieur à bac+2, contre 5,6 % des emplois féminins. Trente années plus tard, les proportions ont changé : 21,5 % pour les hommes et 23,9 % pour les femmes. La courbe s’est inversée au début des années 2000. Alors que le nombre d’emplois occupés par des femmes de niveau supérieur à bac+2 a été multiplié par 5,7 en trente années, il ne l’a été que de 2,8 chez les hommes. Au total, la part des hommes parmi les cadres a baissé de 80 à 60 %.
Troisièmement, le taux d’activité des hommes a baissé, alors que celui des femmes a progressé de manière spectaculaire. Au cours des trente dernières années, chez les 25-49 ans, le taux d’activité féminin est passé de 71 % à 83 %, celui des hommes de 97 % à 93 %. Cette baisse régulière tout du long de la période représente à elle seule l’équivalent de 600 000 emplois masculins [1]. Une partie non négligeable des hommes adultes (7 %) ne se porte plus sur le marché du travail, comportement qui a été très longtemps réservé aux femmes (dites « au foyer »). Deux explications sont possibles. La première est négative : le découragement d’une partie des hommes devant des conditions d’emploi devenues plus difficiles, notamment pour les générations d’adultes peu qualifiés. La seconde est plus positive : la baisse du taux d’activité des hommes date des années 1980, elle peut aussi correspondre à un partage des rôles domestiques un peu moins déséquilibré, une partie des hommes arrêtant leurs activités pour prendre en charge leurs enfants [2]. En même temps que cette baisse du taux d’activité, on enregistre une progression du travail à temps partiel des hommes. Certes, il reste à 80 % féminin mais la part de femmes occupées en temps partiel stagne autour de 30 % depuis bientôt 20 ans, alors que celle des hommes a augmenté de 6 % à 8 %. Le rattrapage est modeste, mais incontestable.
Tous ces éléments ont conduit à un rapprochement, puis à une égalisation des taux de chômage entre les hommes et les femmes. Historiquement, le taux de chômage masculin a toujours été inférieur à celui des femmes. Dans les années 1980, il était deux fois moins élevé (3,5 % contre 7 % pour les femmes). A partir de 2012, les taux sont devenus équivalents et depuis cinq années le taux de chômage masculin est resté quasiment toujours supérieur au taux féminin, ce qui marque un changement social majeur. L’évolution des taux d’emploi des 25-49 ans (part de personnes ayant un emploi rapportée à la population de cet âge) est spectaculaire : au cours des trente dernières années, le taux d’emploi des femmes a progressé de 20 points, de 57 à 76 %, quand celui des hommes a baissé de plus de 10 points, de 96 à 84 %.
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[1] Voir « Le taux d’activité des hommes et des femmes en baisse », Centre d’observation de la société, 10 avril 2017.
[2] En partie les raisons peuvent être liées : faute de trouver des emplois convenables, une partie des hommes s’arrête pour s’occuper des enfants.