PARIS – Le recours croissant à la sous-traitance dans l’activité chimique, pétrochimique et nucléaire, fragilise la sécurité industrielle et inquiète syndicats comme experts, en raison notamment de la complexité de l’organisation du travail et de la dilution des responsabilités.
Dans nos industries considérées comme à risque, la prévention comporte trop de règles, trop de coûts, trop de complications. En clair elle génère moins de profits. De là, le choix de sous-traiter les risques, a accusé Charles Foulard, coordinateur CGT du groupe Total lors d’un récent colloque sur les risques industriels.
Les facteurs humains et organisationnels sont primordiaux pour la maîtrise des risques d’accidents majeurs et on a de plus en plus recours à cette organisation du travail (la sous-traitance) où tout est en mode dégradé, a-t-il insisté.
Selon une étude de l’Institut national de l’environnement et des risques (Ineris), l’erreur humaine est à 64% à l’origine des accidents majeurs. 29% des accidents sont liés à la fiabilité des équipements et seulement 2% imputables à des facteurs environnementaux.
Les sous-traitants sont souvent formés au rabais. La sécurité leur est imposée comme une contrainte lourde de plus, charge à eux d’arbitrer les contradictions avec la rentabilité qui leur est exigée, a estimé François Duchene, chercheur à l’université de Lyon.
De plus, le temps qui leur est accordé pour accomplir leur tâche est très souvent contraint, et n’intègre pas toujours la durée nécessaire pour comprendre et donc pour être en capacité d’anticiper le danger qui les entoure, a-t-il ajouté.
Pour Michel Lallier, du Haut Comité à la transparence et à l’information sur la sécurité nucléaire, un organisme officiel, un des dangers de la sous-traitance est celui de la sous-traitance +en cascade+ qui permet au donneur d’ordre de faire supporter à un sous-traitant la gestion de l’emploi.
Le président de la Fédération chimie CFE-CGC, Philippe Jaeger, modère ces propos en précisant à l’AFP que l’encadrement est quand même présent dans ces usines et contrôle les salariés intérimaires.
Des chartes, qui se donnent comme objectif d’avoir une sous-traitance directe, existent de plus en plus comme chez Rhodia ou EDF. C’est un des moyens de sécuriser le recours à la sous-traitance, a souligné de son côté Marc Blanc, secrétaire fédéral CFDT en charge de la branche chimie.
Le rapport de la Commission d’enquête après l’accident de l’usine AZF, en septembre 2001, a alerté un an plus tard sur le danger de l’utilisation d’entreprises sous-traitantes, considérées comme un point de fragilité d’un site.
Pour Jean-Yves Le Déault, député PS de Meurthe et Moselle et rapporteur de la Commission, il faut d’abord interdire aux prestataires extérieurs de recourir eux-mêmes à des sous-traitants. Avec cette sous-traitance en cascade, il n’y a plus aucun contrôle. Les entreprises ne connaissent plus les personnes qui interviennent sur leur site, avait-il souligné.
Pour lui, la vraie question, est celle de la transmission des informations entre l’employeur et ses sous-traitants, ces dernier permettant au donneur d’ordre de se décharger et de se désengager de certaines responsabilités.
Selon l’Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS), les effectifs des sous-traitants dépassent parfois en nombre ceux des entreprises utilisatrices. Plusieurs études de l’Institut révèlent que les accidents sont multipliés par cinq et sont deux fois plus graves dans les entreprises sous-traitantes.
Une grande part du personnel d’EDF est issue d’entreprises sous-traitantes, la maintenance des réacteurs nucléaires étant par exemple effectuée à 80% par des intérimaires, selon la CGT.
AFP / 10 mai 2011
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