La grande faiblesse du syndicalisme français

13 juillet 2016 | Emploi et Chômage

En Europe, la France se caractérise par un taux de syndicalisation particulièrement faible. Le ministère du Travail vient certes de réévaluer ce taux à 11 % des salariés, contre 8 % estimés jusque-là, mais même ainsi, la France se trouve toujours en queue du peloton, en compagnie des pays d’Europe centrale et orientale, où le syndicalisme a bien du mal à prendre pied depuis la chute du mur de Berlin.

Avec 18 % de syndiqués seulement, nos voisins allemands ne sont certes pas eux non plus au top, contrairement à ce qu’on imagine souvent. Ils sont même significativement moins syndiqués que les Britanniques (26 %). Mais l’Hexagone fait aussi exception vis-à-vis du reste de l’Europe du Sud, où les taux de syndicalisation dépassent les 20 %. Sans surprise, c’est dans les pays scandinaves, mais aussi chez nos voisins belges, qu’on trouve une majorité de salariés syndiqués.

Une longue histoire d’hostilité au syndicalisme
Une faiblesse chronique
Cette faiblesse française est ancienne : le taux de syndicalisation avait très brièvement culminé à 30 % dans l’immédiat après-guerre, mais il était rapidement revenu aux alentours de 20 %. Même la période qui avait suivi mai 1968 n’avait pas entraîné de redressement sensible. Il faut dire que la France se caractérise par une longue histoire d’hostilité au syndicalisme.

La Révolution française fut en particulier un grand moment de libéralisme économique : une des principales réalisations des révolutionnaires avaient été la liquidation des corporations, ces regroupements d’entreprises qui s’entendaient sur les prix et contrôlaient les possibilités d’installations. Elles étaient accusées de freiner l’activité en limitant la concurrence.

Lois d’Allarde et Le Chapelier
Mais du coup, les coalitions de salariés, comme on disait à l’époque, ont elles aussi été pourchassées. Les révolutionnaires ont édicté contre elles les lois d’Allarde et Le Chapelier en 1791. En présentant son projet, Isaac-René-Guy Le Chapelier avait été très clair : « Il n’y a plus de corporations dans l’Etat, il n’y a plus que l’intérêt particulier de chaque individu et l’intérêt général. Il n’est permis à personne d’inspirer aux citoyens un intérêt intermédiaire, de les séparer de la chose publique par un esprit de corporation. »

La négociation sociale ne s’est jamais vraiment remise de cette rupture

Et ce n’est que quasiment un siècle plus tard, en 1884, que les syndicats seront autorisés. La négociation sociale ne s’est cependant jamais vraiment remise de cette rupture. Aujourd’hui encore, les pays où la négociation collective est forte, dans le monde scandinave et germanique en particulier, sont aussi ceux où le passage du féodalisme au capitalisme s’est effectué progressivement sans cette élimination brutale des structures corporatistes.

Cela étant dit, la faiblesse du syndicalisme hexagonal doit aussi être relativisée : les salariés français n’adhèrent pas à un syndicat parce qu’ils n’en ont pas besoin pour bénéficier des bienfaits qu’apporte l’action syndicale. Dans les pays scandinaves ou en Belgique, les allocations chômage ont longtemps été versées par les syndicats. C’est le cas aussi pour les retraites complémentaires en Italie.

Au Danemark ou en Italie, ce sont les directions d’entreprise qui versent directement les cotisations aux syndicats au moment d’établir les payes. En France a contrario, un syndiqué n’aura le plus souvent que des ennuis supplémentaires.

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