[SUISSE] La santé mentale au travail coûte dix milliards par an aux entreprises

05 septembre 2019 | Stress Travail et Santé

Plus d’une personne sur cinq se sent stressée au travail; les cas de burn-out et de dépression sont en augmentation, selon l’OMS. Un véritable défi pour la majorité des entreprises aujourd’hui. En Suisse, les pertes économiques sont estimées à dix milliards de francs par année, selon l’OCDE.

David Forster est agent d’escale chez Swissport à l’Aéroport de Genève. Il a été soumis à des tensions extrêmes durant plusieurs mois: passagers irrespectueux, vols retardés, manque de personnel.
Un jour il a craqué: « J’ai franchi la porte de l’aéroport, et là c’était la crise de panique, les sueurs froides: je n’étais pas bien du tout. Quelques jours auparavant, j’avais vécu des situations très compliquées au travail, des annulations de vols, des passagers à qui je devais répondre et on n’avait pas assez de personnel; donc sur le moment, il y avait beaucoup de choses et tout dans la tête a fait que ça a bouillonné. Et ça a lâché ».
Il se retrouve en arrêt maladie: il doit ensuite subir plusieurs opérations, c’est l’engrenage. Heureusement, le responsable du service social de Swissport, Daniel Parmelin, a très vite affiché sa volonté de soutenir David Forster. Tout au long de sa période d’arrêt, ils sont restés en contact, avec le soutien de l’AI, en vue de le réintégrer.

La dépression, la maladie du siècle

Sur les 230’000 bénéficiaires actuels d’une rente d’Assurance invalidité (AI), 102’000 souffrent d’un trouble psychique. Selon l’AI, cette hausse des troubles psychiques devrait se poursuivre dans les années à venir. La dépression est désignée comme « LA » maladie du siècle. Elle est en tête de liste des problèmes de santé mentale.
L’AI tente d’intervenir de plus en plus tôt dans la prise en charge des cas de burn-out en entreprise. Elle apporte son soutien financier, ce qui permet de récupérer des situations difficiles et de réintégrer la personne lésée: « C’est très coûteux pour l’employeur », remarque Natalia Weideli-Bacci, directrice de l’office AI de Genève: « Si vous avez affaire à des grandes entreprises qui ont des départements de ressources humaines avec des collaborateurs qui peuvent faire ce type de prise en charge, c’est une chose. Mais quand ce sont de petites entreprises qui sont soumises aux mêmes contraintes et qui mettent les mêmes pressions sur leurs collaborateurs, pour elles, la marge de manœuvre est beaucoup moins importante ».
Car, d’après les responsables du personnel, 25% de leurs collaborateurs ont connu un problème psychique qui a altéré leur capacité de travail ces dernières années. Dans 70 à 85% des cas, le problème lié à un trouble psychique a donné lieu à un licenciement.
« C’est clair que c’est un investissement, souligne Daniel Parmelin. Mais on a aussi des assurances qui viennent aider, et ça fait partie de la volonté et des valeurs de l’entreprise ».

Soutenir la santé mentale devrait faire partie de la déontologie des entreprises

Toutes les entreprises ne sont pas préparées à gérer ces situations qui devraient augmenter fortement au cours des dix prochaines années. Dans le cas de David Forster, la prise en charge rapide et bienveillante de sa situation a permis d’éviter le pire: « Ça m’a soutenu moralement, car je voyais qu’à l’intérieur de l’entreprise on ne m’avait pas lâché », affirme-t-il.
Car quand la ligne rouge est franchie, les conséquences pour l’employé, mais aussi pour l’entreprise peuvent être très douloureuses.
Chloé Steulet/sjaq

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