Les chiffres introuvables du suicide des médecins français

26 juin 2020 | Suicide Au Travail

Tout le monde s’accorde pour dire que la prévalence du suicide chez les médecins français est plutôt forte. Mais « forte », c’est combien, exactement ? Très difficile de le déterminer, car les statistiques sur le sujet sont étonnamment rares et incomplètes.

« Chaque année, 45 médecins se suicident », titrait Le Point en 2014, citant des chiffres fournis par l’Union française pour une médecine libre (UFML) à l’occasion d’un « happening » organisé devant le ministère de la Santé. « Le taux de suicide des médecins est à peu près le même que celui des agriculteurs », affirmait de son côté en 2017 sur RMC le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France (FMF). Des chiffres qui tendent à montrer que le suicide est un problème particulièrement présent dans la communauté médicale… et qui, pourtant, s’appuient sur des données limitées.

Telle est du moins l’opinion du Pr Michel Debout, professeur émérite de médecine légale et de droit de la santé à Saint-Étienne, qui a travaillé sur le dernier rapport de l’Observatoire national du suicide. Il a notamment étudié les liens entre ce geste et le travail. « Les études sur le suicide des médecins sont parcellaires », indique-t-il. « On ne peut pas dire que les chiffres cités par les syndicats sont faux, mais il s’agit plutôt d’ordres de grandeur que de données vérifiables. »

La faute aux certificats de décès

Et cette pauvreté des données n’a rien de spécifique aux médecins. « Il est difficile d’avoir des éléments précis sur le suicide métier par métier, car les certificats de décès, qui devraient être la principale source d’information, mentionnent rarement le métier de la personne décédée », explique le Stéphanois. Résultat : seules les professions particulièrement mobilisées sur le sujet du suicide disposent de données plus précises. C’est notamment le cas des agriculteurs : leur caisse sociale, la Mutualité sociale agricole (MSA), effectue des enquêtes régulières sur le sujet.

Chez les médecins, on pourrait s’attendre à ce que le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom), représentant naturel de la profession qui n’est habituellement pas avare d’études statistiques en tout genre, fasse de même. Hélas, ce n’est pas le cas. « Le Cnom ne dispose pas de chiffres sur le nombre de suicides chez les médecins », nous indique-t-on du côté de la vénérable institution. « Ces données n’existent pas, le décompte semblant impossible, notamment pour les médecins libéraux. »

Lire la suite, « Un risque multiplié par 2,4 ? », sur le site www.whatsupdoc-lemag.fr

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