Harcèlement moral : quels sont vos droits ?

28 octobre 2021 | Dans la Loi

Dans la grande distribution, dans la banque, et même à l’université de Tours, plusieurs affaires de harcèlement moral se retrouvent ces jours-ci devant la justice. Quels sont les contours et les limites du harcèlement moral ?

Paul van Deth est avocat spécialiste du droit social au cabinet Vaughan, à Paris. Alors que plusieurs affaires de harcèlement moral font l’actualité, il définit les contours de cette notion juridique.

franceinfo : comment fait-on la différence entre harcèlement moral et l’exercice de l’autorité ?

Paul van Deth : ça n’est pas facile, parce que le harcèlement moral est une notion juridique protéiforme. Le Code du travail nous dit que le harcèlement ce sont des faits répétés ayant pour objet ou pour effet la dégradation des conditions de travail ou l’altération de la santé et cette appréciation, elle se fait au cas par cas, donc un abus d’autorité n’est pas nécessairement un harcèlement moral, mais peut l’être dans certaines circonstances.

Le harcèlement moral est-il forcément le fait de l’employeur ou peut-il provenir d’autres personnes ou d’un mode d’organisation ?

L’auteur peut être un manager, peut être un collègue, peut même être un subalterne, un client dès lors qu’il a une autorité de fait et il peut résulter d’un mode managérial, qui provient d’une méthode qu’a instituée la société avec une volonté de mettre en difficulté ou de voir démissionner des salariés. On l’a vu dans un cas retentissant qui a fait l’objet d’une condamnation pénale, qui est l’affaire Orange.

Il faut que les faits soient répétés ? À quelle fréquence et sur quelle durée ?

Cela peut être dans un temps extrêmement court dès lors que les faits sont répétés. La fréquence importe peu. Les juges vont regarder les circonstances et voir s’il y a dégradation des conditions de travail de sorte que l’obligation de sécurité de l’employeur peut être engagée ou alors plus grave encore harcèlement moral.

Comment prouve-t-on qu’on est victime de harcèlement moral ? 

Le salarié n’a pas à prouver la réalité du harcèlement moral, en tout cas devant un conseil de prud’hommes. Il doit apporter des éléments factuels laissant supposer l’existence d’un harcèlement moral. La preuve est aménagée, on lui facilite les choses. Il doit apporter des éléments sérieux laissant supposer l’existence du harcèlement, mais il ne doit pas le démontrer nécessairement. 

Est-ce que cela débouche forcément sur des dommages et intérêts ?

La question des dommages et intérêts n’est pas la plus importante. Les dommages et intérêts ne portent pas sur des sommes considérables, mais ce qui est considérables ce sont les conséquences de la condamnation. Lorsque vous êtes harcelé et que vous obtenez la condamnation de votre employeur, c’est souvent dans le cadre d’une rupture de contrat de travail et là ça peut engager des conséquences indemnitaires bien plus importantes que la seule condamnation au harcèlement moral.

Comment les juges évoluent par rapport à ces affaires toujours plus fréquentes ?

On a une jurisprudence qui a été bâtie depuis des années, qui amène les juges à ne pas être manichéens. Ils regardent les éléments factuels et il y a de très nombreux cas où le salarié considère qu’il est harcelé et où le juge ne le suit pas.

Écouter l’émission sur le site https://www.francetvinfo.fr

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