« Débordé ». L’adjectif traduit littéralement notre situation actuelle, selon la philosophe C. Fleury : dépassés par les événements, mais aussi expulsés de notre propre vie. Et si la nature nous aidait à retrouver un sens de la limite salutaire ?
Extrait du numéro du 29 novembre 2016. La consultation de l’article est payante.
Cynthia Fleury – Il y a un phénomène d’expulsion de son espace-temps, qui peut être de l’accélération, mais pas uniquement. Les individus se sentent comme « expulsés » de leur vie. Je pense à ce que disait Bettelheim sur les comportements autistiques. Pour calmer un autiste, il faut mettre des bords, car ils ont des « comportements de frontières ». Ils doivent « toucher », « mettre du bord », pour récupérer un espace et un temps parce que, précisément, ils ne se sentent pas intégrés dans un espace-temps. Quand les gens me disent : « Je suis dé-bordé », le mot est très juste. La société, dans sa psychose ordinaire, pousse les gens à sortir de leurs bords, leur donnant le sentiment qu’ils sont perpétuellement à nu, sans enveloppe, mis à disposition. L’hystérie, ou tout autre comportement à tendance psychotique (variant selon la personnalité de chacun) devient une réaction quasi épidermique tant l’usure est grande. C’est un phénomène d’érosion, qui découle d’un management par le harcèlement, par la placardisation. Il remet en cause l’enveloppe psychique de l’autre, un autre que l’on vient attaquer directement ou plus sournoisement.
Plus qu’une accélération, c’est un phénomène de dépossession et de déperdition. Les uns et les autres sont soumis à une expulsion de leur vie, qui peut confiner à une expulsion corporelle – au sens où ils ne se supportent plus ou mal. C’est la traduction somatique du fait de ne plus avoir de place, d’espace, de temps…
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