Conséquence de milliers de suppressions de postes chez les guichetiers SNCF, les espaces de vente ferment les uns après les autres et les files d’attente s’allongent, surtout en cette période de vacances. Les cheminots, mis sous pression, perdent le sens de leur métier.
La journaliste Clarisse Josselin a fait le tour de quelques secteurs sensibles pour la revue FO Hebdo cette semaine…
Il y a beaucoup de conflits, on se fait engueuler sans arrêt, même les clients se battent entre eux, lâche Harold Gorschka, manager d’espace de vente à la Gare du Nord, à Paris, et membre FO de la commission locale. Ces dernières années, plusieurs milliers de postes d’agents aux guichets et en gare ont été supprimés, entraînant la fermeture progressive d’espaces de vente partout en France. La direction prétexte une baisse de fréquentation et prétend s’adapter aux nouveaux modes de consommation des clients, de plus en plus tournés vers le numérique.
Reste que pour payer en espèces ou en chèques-vacances ou simplement pour traiter avec un être humain, des voyageurs continuent d’aller aux guichets. Et la durée d’attente dépasse souvent l’heure.
À la Gare du Nord (la plus grande d’Europe), il ne reste que treize guichets et la casse pourrait se poursuivre. Au lieu d’aider les vendeurs, je passe mon temps à gérer la file à l’extérieur, explique Harold Gorschka. Il y a tellement de monde que les gens n’ont pas accès à la borne à billets et comme le pôle d’information a fermé, on vient aussi nous demander tout et n’importe quoi.
Selon l’affluence, il n’est pas toujours possible d’acheter un billet pour un autre jour. Dans d’autres gares, un rendez-vous préalable est même obligatoire. On veut dégoûter les clients pour les virer des guichets et c’est sur nous qu’ils s’énervent, poursuit-il. Nous n’avons plus le temps de conseiller, nous sommes devenus des machines.
Comment tiennent les cheminots dans ces conditions ? « On ne tient pas. Je n’ai jamais vu autant de ruptures conventionnelles et les arrêts de travail sont nombreux. Mais tout le monde s’en fout. L’an dernier, on a eu un jour quatre heures d’attente, c’était l’émeute. On a exercé notre droit de retrait. Il a fallu que l’espace de vente reste fermé quatre jours pour que la direction vienne nous voir », explique-t-il.
Des agents rappelés sur leurs repos
À la gare de Strasbourg aussi, les arrêts maladie sont nombreux. Il y a un très grand mal-être, des guichetiers sont rappelés sur leurs repos pour venir travailler et des congés sont refusés, explique Philippe Rauch, élu FO au CSE TGV axe est.
Face à cette situation, la Ministre des Transports a promis des renforts le 5 juillet. « C’est du sparadrap alors que nous voulons de vrais emplois. À Strasbourg, nous faisons déjà appel à des CDD et à des intérimaires pour parer à l’urgence mais il faut un mois pour les former et on perd du temps », poursuit-il.
Destruction des métiers, polyvalence, perte de sens, pression permanente… Tous ces éléments sont explosifs. « Les risques psychosociaux sont une évidence totale, il y a une surcharge de travail et les cheminots ne se reconnaissent plus dans l’entreprise », dénonce Aurore Prévost, agent commercial et secrétaire de syndicat FO. Ça touche les guichets mais aussi les postes transversaux, comme ceux de la sécurité. Il ne s’agit plus de service public mais de rentabilité à tout prix.
L’expérimentation de la vente des billets SNCF dans les bureaux de tabac a ainsi été annoncée.
Cette course aux économies est la conséquence de l’ouverture à la concurrence de la SNCF dès 2020.
Aurore Prévost pointe aussi les effets de la mise en place du CSE fin 2018. « Avec la baisse du nombre de représentants du personnel, il y a moins de vigilance et moins d’interlocuteurs », alerte-t-elle.
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