Dans un contexte économique et social plus dur, suggérer aux patients qui vont mal de changer leur manière de penser ne suffit plus.
Il n’y avait pas de raison qu’ils y échappent: alors que tous les corps de métier se voient bousculés par la crise économique, la récession, mais aussi les évolutions technologiques et l’état de la planète, les psys eux-mêmes, jusque-là cantonnés à la sphère intime, commencent à se poser des questions sur leur rôle dans un monde plus dur.
Pour preuve, la publication de deux livres les «interpellant»: celui de la psychanalyste Claude Halmos qui montre que les répercussions psychiques sur l’individu d’un contexte social délétère ne peuvent désormais plus être tues par la profession (surtout lorsque celle-ci s’exprime dans les médias) ; celui aussi du psychanalyste Alain Valterio qui, dans une toute autre position, fustige La Névrose psy (Éd. Favre), culture par trop maternante qui, selon lui, «laisserait penser que plus aucune souffrance ne doit être bravée et qu’il suffirait de la confier pour s’en délivrer, la vie devant avoir avec nous la même bienveillance qu’est supposé avoir le thérapeute avec son patient».
Un travail «d’orfèvre»
À venir aussi, un colloque organisé par la Fédération française de psychothérapie et psychanalyse (FF2P), qui s’interrogera sur la «place du psy dans un monde en mutation»*. «Oui, la perte de repères et de sens s’est intensifiée», estime la psychothérapeute Michelle Vinot-Coutebergues, vice-présidente de la FF2P et organisatrice de cette manifestation. «Même les traumas familiaux ont changé, et il y a de nouvelles souffrances au travail. Avec l’accélération des processus de communication et de changement, les patients n’ont plus le temps de reconstituer leurs ressources intérieures. C’est à une véritable fragmentation du psychisme comme des liens sociaux que nous assistons. Tout praticien doit alors, selon sa méthode, tenter d’y répondre.» Ce qui implique selon elle que chaque psy doit plus que jamais travailler «comme un orfèvre, aidant au retissage chez nos patients de dimensions émotionnelles et cognitives très abîmées par le contexte».
La prise en compte d’une dimension de souffrance qui n’a donc rien d’imaginaire s’impose. Oui, certains patients craignent de perdre leur emploi, et ils ont raison ; certains couples ne s’entendant plus restent ensemble parce que, économiquement, c’est plus facile… Ce ne sont alors pas seulement des «fantasmes» ou des «manières de penser» qu’il s’agit d’écouter, mais d’indéniables réalités.
Lire la suite sur Le Figaro Santé