UE PSY 204 : Vers un travail sans le corps ?

Formation

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Cette UE s’adresse à toute personne désireuse de croiser les champs de l’analyse du travail et de la philosophie.

Ses buts pédagogiques sont :

  • la mise en lumière du lien d’engendrement de la pensée et du sentiment du moi par la résistance
    opposée à l’effort du corps.
  • la compréhension du travail comme mobilisation de celui-ci.
  • la déconstruction du fantasme managérial et transhumaniste du travail possible sans
    l’engagement du corps.

Calendrier (second semestre : lundis 18-21h) :

  • 10 et 24 février 2020 ;
  • 2, 9, 16, 23 et 30 mars ;
  • 20 et 27 avril ;
  • 4, 11, 18 et 25 mai ;
  • 1er juin.

Argumentaire :

La sensibilité au destin du monde découlant de l’expérience du courage (celle d’une tension psychique et corporelle entre unité de la raison et bouillonnement du cœur) constitue un prisme d’appréciation possible de l’enjeu anthropologique de l’évolution de l’organisation du travail vers la « désincarnation » (Dujarier, 2015) de celui-ci. Cet enjeu peut être défini en termes de changement de l’importance accordée à l’idée de complexité vivante en laquelle consiste l’être humain, que le taylorisme, cherchant à implanter la rationalité scientifique dans le corps (Musso, 2017), s’est ingénié à domestiquer.

Sous couvert d’aider l’individu « autonome » à s’affranchir des limitations de son corps à travers la recherche d’une augmentation de sa vitalité (Hamraoui, 2016), la nouvelle organisation du travail le prive, quant à elle, de tout rapport sensible à lui. Elle ignore la nécessité, mise en lumière par la philosophie de Maine de Biran (1766-1824), d’un contact de l’esprit avec la zone du sentiment – originellement constitué par les synthèses passives produites par les flux d’impressions, d’affections et de sensations qui nous traversent – condition de son affinement (Bégout, 1995). Contact en l’absence duquel l’esprit se brutalise.

La nouvelle organisation du travail ignore par ailleurs la distinction sans séparation, elle aussi établie par Biran, entre la vie physiologique, ou
domaine de la seule vitalité des fonctions organiques, et la vie de la pensée, ou sphère de la « vie active », en réduisant la compréhension des lois de la seconde à celle des automatismes de la première. Elle méconnaît enfin l’influence de l’habitude – discréditée en soi – sur la faculté de pensée :
« … quelquefois, dit à ce sujet Biran dans son Journal (28 janvier – 2 février 1816), mon cerveau se monte par suite de ses anciennes habitudes et aux heures de travail accoutumées ; je commence quelque chose et je sens le besoin organique de penser, de travailler d’esprit, comme on sent à certaines heures le besoin de manger. »

Or, ce caractère « habitué », mais toutefois non programmable de la pensée, qui relève du « temps du moi » (Bégout, 2005), demeure incompatible avec les règles d’un management ignorant les singularité de l’agir humain (Deslandes, 2016) et la fonction anthropologique du travail supposant l’engagement du corps, ainsi définie par l’ergonome Pierre Cazamian (2009), lecteur de Biran : « Le concept, spécifiquement humain, de travail introduit une stratégie de conquête du monde extérieur qui, par le jeu du contradictoire, substitue une combativité et une créativité entièrement originale. [De sorte que l’] acte qui, rencontrant une résistance imprévue, échoue à maîtriser un obstacle, retourne à son auteur, se réfléchit en lui, l’instruit par cet échec même et l’incite à recomposer dans son imaginaire les données du problème pour inventer une nouvelle issue”. » La pensée naît de l’effort contrarié du corps.

Contact :

Éric Hamraoui (eric.hamraoui@lecnam.net),
responsable opérationnel ; Jaëlle Bakazolo (jaelle.bakazolo@lecnam.net)

Informations complémentaires et inscription : https://www.cnam-idf.fr/vers-un-travail-sans-le-corps-psy204

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