Soignants en souffrance: comment mieux les accompagner

11 janvier 2021 | Stress Travail et Santé

La santé mentale des professionnels de santé est mise à l’épreuve depuis le début de l’épidémie. Une période qui accentue des vulnérabilités déjà observées.

Par Judith Chetrit

Avec l’arrivée de la seconde vague et l’affluence de patients Covid-19, les signes d’épuisement physique et psychologique des professionnels sur-sollicités n’ont pas tardé à apparaître. « Même après l’été, la pression n’était pas vraiment retombée. Il y a aussi eu un grand nombre d’arrêts de maladie et de départs », rapporte Gladys Mondière, psychologue à Lille et coprésidente de la fédération professionnelle, qui reçoit depuis l’automne des soignants pour un suivi. « Il y a un décalage habituel entre le temps de l’action et le temps du soin. »

Soutien psychologique

Après le pic du mois d’avril, les services ­Covid-19 ont connu une relative accalmie et laissé place aux autres soins qui avaient été déprogrammés. Dès le printemps, Gladys ­Mondière et d’autres praticiens salariés ou libéraux s’étaient rapidement mobilisés pour proposer bénévolement un soutien psychologique par le biais de consultations en présentiel ou à distance, par téléphone ou en visio. Ces actions locales et nationales se sont ajoutées à d’autres numéros d’appel internes ainsi qu’à la présence courante et plus installée de psychologues hospitaliers dans les services de réanimation, d’oncologie ou de soins palliatifs, qui épaulent les patients, leurs proches et les professionnels dans leurs échanges face aux orientations de soins.

Les cellules départementales d’urgences médico-psychologiques – plutôt spécialisées en cas d’accident collectif et sur un laps de temps plus court – ont également été activées jusqu’au début de l’été. « L’inquiétude et l’incertitude constituent déjà le terreau des premiers troubles avant l’apparition de l’anxiété, des symptômes de dépression, de stress intense et de fatigue exacerbée. Il y a aussi l’augmentation des décès et la peur de contaminer des proches », met en avant Wissam El-Hage, responsable du centre régional de psychotraumatologie au CHU de Tours, qui a lancé fin novembre une seconde enquête auprès de 3?000?professionnels de santé exposés en première ligne au Covid-19.

Au-delà des affiches dans les couloirs rappelant les conseils sur le besoin de sommeil et l’usage du café et des psychotropes, certains dispositifs ont connu des pics d’appels. C’est le cas du numéro vert de l’association Soins aux professionnels de la santé (SPS), joignable jour, nuit et week-end pour avoir accès à des psychologues. « Nous avons cumulé 9?500?appels depuis la fin 2016, dont 5?000 depuis le début du Covid-19. Nous ne connaissons pas encore de rebond d’appels avec cette seconde vague, mais nous lançons une nouvelle campagne de communication, notamment mieux ciblée auprès des étudiants en santé qui font également appel à SOS Internes. Les directeurs d’établissement nous appellent aussi pour prendre des renseignements et communiquer auprès de leurs équipes », informe Éric Henry, médecin généraliste et président de l’association. Parmi les appelants figurent surtout des infirmiers et des aides-soignants, qui peuvent être ensuite orientés vers le réseau national du risque psychosocial où plus d’un millier de praticiens ont été formés par Marie Pezé, psychanalyste spécialisée dans la souffrance au travail. Les deux premières consultations sont offertes par l’association. Peu de médecins passent le premier cap de l’appel. C’est un public plus difficile à toucher, reconnaissent plusieurs spécialistes. « Il n’est pas facile de les convaincre d’aller consulter. Lorsqu’ils appellent, la souffrance est graduée entre 1 (anxiété) et 5 (risque élevé de suicide) », ajoute-t-il.

Des tâches hors du champ des compétences

Lors de la première vague du Covid-19, une enquête de l’association SPS auprès des professionnels de santé montrait qu’ils se disaient anxieux (41?%), épuisés (27?%), en manque de soutien (26?%) ou impuissants (25?%). Selon l’Ordre des infirmiers, 30?% des infirmiers « exercent des tâches qui sortent de leur champ de compétences réglementaire » en raison du surcroît d’activité lié au Covid-19. Cent mille postes seraient vacants dans les établissements publics et privés d’après la Fédération de l’hospitalisation privée.

Lire la suite, « Injonction héroïque », sur le site www.gazette-sante-social.fr

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