En 2015, 25 gendarmes et 45 policiers ont été victimes du suicide : ils sont 709 à avoir ainsi trouvé la mort, sur la décennie. Pour 2015 le taux de suicide s’élève à 26,3/100000 chez les gendarmes (en hausse) et 31,5/100000 chez les policiers (en baisse).
De 2006 à 2015, à structure de population par âge et sexe équivalente, contrairement aux discours habituels, on constate une surmortalité par suicide dans la gendarmerie et la police, significative par rapport à la moyenne française. Les tendances des toutes dernières années montrent globalement une amélioration de la situation dans la gendarmerie mais une aggravation dans la police. L’écart entre les deux forces a été au plus haut en 2014.
Mais, par rapport à 2014, 2015 est marquée par une diminution nette des suicides dans la police et une hausse en gendarmerie. Enfin un phénomène conjoncturel, à la baisse, est remarquable depuis les attentats du 13 novembre 2015 – voir notre hypothèse en fin d’article.
Un sujet douloureux
Le sujet est douloureux et les institutions concernées, à travers des politiques de prise en compte des risques psycho-sociaux tendent à mieux traiter, entre autres, cette problématique, particulièrement complexe.
L’incompréhension, la douleur que suscite toujours ces actes autodestructeurs, même bien au-delà de l’entourage immédiat du militaire ou de l’agent ayant mis fin à ces jours, amène aussi – et c’est bien compréhensible – beaucoup de questions, de doutes et parfois de mise en cause de dysfonctionnements institutionnels, réels ou supposés.
Parallèlement, la nature même du fait, qui touche forcément aussi à la vie personnelle et familiale d’une femme ou d’un homme, et donne lieu à enquête judiciaire, fait obstacle à toute mise sur la place publique (secret de l’enquête mais aussi protection de la vie privée) d’«d’explications» suffisamment détaillées, même si elles sont connues – ce qui est loin d’être toujours le cas.
A défaut, les formules génériques lapidaires « d’un suicide qui ne serait pas en rapport avec le cadre professionnel » laissent le plus souvent perplexes ou sceptiques.
L’utilité d’une réflexion distanciée et comparative
Il vous est proposé ici une réflexion « à froid » notamment à partir des données épidémiologiques pour mieux comprendre l’ampleur globale du phénomène. Parce que parler « chiffres », sans oublier de qui et de quoi l’on parle – c’est à dire de drames humains – permet aussi de ne pas se laisser submerger par l’affectif.
La population de la gendarmerie est (ainsi que celle de la police, dans une moindre mesure parce que plus féminisée), par construction, naturellement exposée, puisqu’elle est très majoritairement masculine… alors que le taux de mortalité par suicide des femmes est en France presque trois fois moindre que celui des hommes.
L’impact de l’âge, variable également très significative en matière de suicide, renforce également, toujours par construction, la fréquence des suicides dans les forces de l’ordre. En effet les taux de suicides enregistrent un taux important, en France dans la classe d’âge des 45-54 ans, tandis que la classe d’âge des 35-44 ans se situe déjà au dessus de la moyenne, et les effectifs des deux forces sont largement constitués de personnels se situant dans ces deux classes d’âge.
Par ailleurs, enfin, la mise à disposition quasi généralisée et permanente d’une arme à feu (l’arme de service), fournit un moyen évident et immédiat pour un passage à l’acte. Pour mémoire les armes à feu sont le deuxième moyen utilisé par les hommes, en France, pour mettre fin à leurs jours (après la pendaison), mais elles sont le premier moyen utilisé par les gendarmes (près de 70% des cas).
Les données pour la population française
En France le nombre de suicide annuel dépasse les 10 000, mais suit, sur toute la décennie, une très lente mais régulière diminution.
En prenant les dernières données de référence de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), en 2012 on comptait en France 10 093 suicides (7 475 hommes et 2 618 femmes) soit un taux de suicide pour 100 000 de 15,8 (24,2 pour les hommes et 7,9 pour les femmes). Le taux de mortalité par suicide augmente avec l’âge. Son incidence pour 100 000 habitants est de 7,6 chez les 15-29 ans ; 19,3 pour les 30-49 ans ; 23,1 pour les 50-69 ans et 28,9 pour les 70 ans et plus.
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