Quel est le grand péril de la situation actuelle ? L'ignorance

19 décembre 2015 | Evènements

Victor Hugo – Discours à l’Assemblée Nationale (séance du 11 novembre 1848)

« Eh ! Quel est, en effet, – j’en appelle à vos consciences, j’en appelle à vos sentiments à tous, – quel est le grand péril de la situation actuelle ? L’ignorance ;
l’ignorance plus encore que la misère, l’ignorance qui nous déborde, qui nous assiège, qui nous investit de toutes parts.
C’est à la faveur de l’ignorance que certaines doctrines fatales passent de l’esprit impitoyable des théoriciens dans le cerveau des multitudes …

On pourvoit à l’éclairage des villes, on allume tous les soirs et on fait très bien, des réverbères dans les carrefours, dans les places publiques ; quand donc comprendra-t-on que la nuit peut se faire aussi dans le monde moral, et qu’il faut allumer des flambeaux pour les esprits ? …

Oui, Messieurs, j’y insiste. Un mal moral, un mal profond nous travaille et nous tourmente. Ce mal moral, cela est étrange à dire, n’est autre que l’excès des tendances matérielles.

Eh bien, comment combattre le développement des tendances matérielles ?
Par le développement des tendances intellectuelles.

Il faut ôter au corps et donner à l’âme …

Il faut relever l’esprit de l’homme, le tourner vers la conscience, vers le beau, le juste et le vrai, le désintéressé, et le grand.
C’est là ; et seulement là, que vous trouverez la paix de l’homme avec lui-même, et par conséquent la paix de l’homme avec la société.

Pour arriver à ce but, Messieurs, que faudrait-il faire ?…
Il faudrait multiplier les écoles, les chaires, les bibliothèques, les musées, les théâtres, les librairies ; il faudrait multiplier les maisons d’études, pour les enfants, les maisons de lecture pour les hommes ; tous les établissements, tous les asiles où l’on médite, où l’on s’instruit, où l’on se recueille, où l’on apprend quelque chose, où l’on devient meilleur, en un mot ; il faudrait faire pénétrer de toutes parts la lumière dans l’esprit du peuple, car c’est par les ténèbres qu’on le perd. »

Victor Hugo
Discours à l’Assemblée Nationale (séance du 11 novembre 1848)
 
 

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