Michel Kalika, professeur en stratégie et systèmes d’information à l’IAE Lyon, revient sur la responsabilité organisationnelle d’une université parisienne confrontée à un cas de harcèlement d’un enseignant vis-à-vis d’une étudiante chinoise à Pékin, candidate à l’une des formations de l’établissement français.
[…] Le cas présenté ci-dessous, qui s’est déroulé dans une grande université parisienne, illustre bien l’un des aspects liés à ce problème : la responsabilité organisationnelle.
LE CAS
Une étudiante chinoise est candidate à Pékin à un programme d’une université parisienne. L’enseignant qui traite son dossier et qui réalise les entretiens sur place a recours à toute une série de harcèlements sexuels (SMS, invitations au bar de son hôtel, dans sa chambre, etc.) avant l’entretien de sélection puis, au final, ne retient pas sa candidature.
L’étudiante, choquée par ces pratiques, entre alors en contact avec un professeur de la même université qui lui conseille de consigner par écrit et dans le détail tous les faits. Elle lui envoie une lettre de plus de deux pages comportant la description des faits.
Il conseille alors à l’étudiante d’adresser cette lettre au président de l’université parisienne qui réagit en faisant recevoir l’étudiante à Pékin par un correspondant de l’université, puis la fait inscrire dans le programme où elle avait été refusée, programme dirigé par l’enseignant harceleur.
Neuf mois plus tard, le professeur rencontre par hasard l’étudiante dans l’université parisienne et elle lui indique qu’elle n’est probablement pas la seule à avoir été victime de harcèlement, que ces pratiques continuent dans la classe de l’enseignant. Il est à noter que 90% des étudiantes de ce programme sont des jeunes filles.
Le professeur alerte alors ses collègues du centre de recherche auquel appartient également l’enseignant harceleur et ceux-ci saisissent le président de l’université. Plusieurs mois plus tard, ces enseignants se réunissent dans le bureau du président et conviennent de la nécessité d’écarter l’enseignant indélicat de sa responsabilité de directeur de programme. Le responsable du centre est chargé de la mise en œuvre de cette décision mais rien n’est fait, malgré les mails répétés du professeur qui avait lancé l’alerte.
Dix-sept mois après les faits cités au début du cas, ce même professeur est informé par un collègue d’une autre université de faits de viol sur une collègue par l’enseignant harceleur. Il en informe aussitôt ses collègues du centre de recherche, ainsi que la présidence de l’université, et menace de transmettre les documents en sa possession au Procureur de la République.
Ces documents seront transmis à la justice dans les jours qui suivent par le président de l’université. Postérieurement à ces faits, le professeur a appris qu’une autre étudiante du même programme s’était plainte auprès d’un syndicat étudiant, de la direction des masters, du service juridique et de la présidence de faits de harcèlement sans qu’aucune suite ne soit donnée.
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