Face à la pénurie de personnels soignants, les Agences régionales de santé (ARS) redécouvrent les vertus d’un bon salaire et d’un emploi plus stable. Mais cela ne règle pas la souffrance au travail, immense à l’hôpital.
Face à la pénurie de professionnels de santé dans les hôpitaux franciliens, l’Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France propose une prime allant de 4 000 à 7 000 euros. Cette mesure, provisoire, prendra fin le 28 février. Elle est réservée aux infirmières et infirmiers diplômés d’État effectuant actuellement des missions de travail intérimaire dans un hôpital, à condition qu’ils et elles signent un CDD de 6 mois minimum (9 maximum) dans ce même établissement. Afin d’attirer le camarade travailleur, le temps partiel est possible.
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Il s’agit pour les fonctionnaires des ARS de faire en sorte que les hôpitaux tiennent jusqu’à l’automne, moment où arriveront de nouvelles fournées de blouses blanches. Si les ARS ont été créées, c’est pour que des fonctionnaires, qui ne connaissent rien à la santé, et c’est volontaire, contrôlent le travail des personnels soignants, afin de le rendre plus « efficace ».
Le néo-libéralisme, c’est quand le mauvais État remplace le bon
Il s’agit donc d’accroître la bureaucratie au nom de l’efficacité économique, ce qui est une caractéristique du néo-libéralisme. Le libéralisme, c’est « laissez faire, laissez passer ». Le néo-libéralisme, c’est détruire méthodiquement l’État afin de lui faire mimer les comportements de marché. Ce fut le bilan des années Thatcher au Royaume-Uni, où la privatisation du rail a conduit à la création d’un invraisemblable nombre d’agences publiques, de compagnies privées, etc., propulsant les passagers dans un enfer à côté duquel le site de la SNCF ressemble à des vacances à Ibiza.
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Et là où cela devient franchement magique, c’est que ces ARS, tout comme le ministère de la Santé lui-même, sont, depuis le début de la pandémie, conseillées par le cabinet McKinsey. Le même qui permet aux entreprises de faire un maximum d’optimisation fiscale, histoire que les hôpitaux n’aient plus d’argent. Le même qui fait des consultations à presque 500 000 euros pour étudier les évolutions du métier d’enseignant. (Si cela vous semble fou, c’est normal).
Face aux 3 000 postes vacants (au moins) en Île-de-France, les fonctionnaires de l’ARS redécouvrent les vertus de la stabilité de l’emploi. Comme le dit sa directrice : « On veut dire à des intérimaires : venez pour une durée qui n’est pas très longue – six ou neuf mois – dans un hôpital où vous intervenez déjà, et venez voir comment ça se passe quand on est durablement affecté dans l’équipe. » À se taper le cul par terre quand on n’a cessé de supprimer des postes, non??
Des établissements inhospitaliers
La difficulté va être de convaincre des personnes de travailler de façon continue dans des établissements où la souffrance physique et morale est devenue la norme. Dans sa grande enquête, le collectif Nos Services Publics l’a bien montré. Avant encore le salaire, avant encore les conditions de travail, pourtant déplorables, c’est la perte de sens de leur travail qui rend les fonctionnaires les plus malheureux.
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