Didier Sicard: «La France a abandonné la santé publique»

Stress Travail et Santé

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Relations entre le politique et le scientifique, enquête sur les origines animales de l’épidémie, rétablissement d’une politique de santé publique, tribunal sanitaire international… Didier Sicard, ancien président du Comité consultatif national d’éthique, fait le point.

Didier Sicard a été président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) de 1999 à 2008 et chef de médecine interne à l’hôpital Cochin à Paris. Professeur émérite de médecine à l’université Paris-Descartes, ce spécialiste des maladies infectieuses a été très impliqué dans la création de l’Institut Pasteur au Laos.

Face à la situation actuelle et pour éviter une autre épidémie encore plus grave, il explore quelques pistes : enquête scientifique, mais aussi économique et culturelle, sur les origines animales de la maladie ; rétablissement d’une politique de santé publique susceptible de mettre fin à l’effondrement, tout autant budgétaire que moral, de l’hôpital ; mise en place d’un tribunal sanitaire international ; pratique d’une médecine qui ne se cantonne pas aux prouesses technologiques, relations entre le monde politique et le monde scientifique…

Quel regard le spécialiste des maladies infectieuses que vous êtes porte-t-il sur ce virus ?

Je suis surpris par sa violence – même si un tiers ou la moitié des gens qui entrent en contact avec lui ne présentent aucun symptôme – et sa capacité de déclencher une réaction immunitaire qui fait toute sa gravité, et peut vous tuer en quelques heures si vous n’êtes pas pris en charge par une unité de réanimation bien structurée. Ce qui est démesuré, c’est la réaction du corps, davantage que l’attaque du virus lui-même, qui dépasse les capacités de l’organisme.

Il est certain que le virus vient des chauves-souris qui ont sans doute le système immunitaire le plus solide de l’ensemble des mammifères présents sur la planète. Elles ont établi une ligne de défense considérable face à ce virus, qui ne leur fait rien, et il est probable que le virus, pour tenter de dépasser la réponse immunitaire des chauves-souris, a dû monter en gamme et augmenter sa virulence et son agressivité. Le système humain est vraisemblablement surpris par ce qu’il juge être une agression d’ampleur, totalement nouvelle et, dans la panique, déclenche une réponse immunitaire telle qu’elle peut ne pas être supportée par l’organisme.

Vous attendiez-vous à assister à quelque chose de l’ordre de ce que nous vivons actuellement ?

Oui, absolument. Tous les étudiants en médecine que j’ai eus devant moi pendant quarante ans pourraient en témoigner. J’ai toujours dit que notre incapacité à réfléchir à nos contacts avec le monde animal nous jouerait des tours. Si on n’était pas allé découper quelques grands singes au cœur de la forêt congolaise, on n’aurait jamais eu l’épidémie de Sida, qui s’est d’abord transmis des singes aux hommes. Nous sommes dans une chaîne de relation perpétuelle avec les animaux.

En dehors des cancers, les maladies inflammatoires de l’immunité les plus importantes sont quasiment toutes transmises par les animaux. Nous devons nous considérer comme faisant partie d’une chaîne du vivant incluant aussi bien les vaches que les coléoptères. Cela nous rappelle que nous sommes extrêmement vulnérables, mais aussi que, comme le disait Jacques Leibowitch, médecin et spécialiste du Sida récemment disparu, nous sommes d’autant plus forts que nous sommes conscients de notre inscription dans l’ordre du vivant.

Mais que peut apporter l’enquête que vous appelez de vos vœux sur les origines animales de la maladie actuelle ?

Toute notre énergie actuelle se concentre sur le point d’arrivée du virus : les médicaments, le vaccin, la réanimation… Mais le point d’origine est tout aussi important si l’on veut comprendre ce qui se passe aujourd’hui, et éviter une nouvelle épidémie encore plus grave demain. De même qu’on enquête sur l’origine des aliments servis dans un restaurant ayant entraîné des intoxications alimentaires, il est nécessaire d’enquêter sur les origines animales de l’épidémie actuelle.

On n’a pas tout expliqué une fois qu’on a dit que la chauve-souris était à l’origine du virus. Ici, le pangolin, comme la civette lors de l’épidémie de Sras, a sans doute été l’hôte intermédiaire du virus entre la chauve-souris et l’homme. Mais le problème réside dans le marché florissant du pangolin, pourtant théoriquement interdit, et dans le fait d’avoir mis ensemble chauves-souris et pangolins sur des marchés. La Chine achète à prix d’or ces animaux censés avoir des vertus thérapeutiques considérables. On aboutit ainsi à des consommations effrénées de chauves-souris, qui vivent longtemps et sans cancer, au nom d’un rapprochement absurde qui permettrait, en les ingérant, de bénéficier de ces vertus, mais aussi d’écailles de pangolins réputées pour la puissance sexuelle qu’elles donneraient.

Les Chinois ont ainsi mis la main sur le pangolin africain, avec des circuits clandestins partant notamment du Nigeria, et donnant ainsi à cette consommation une ampleur qui n’existait pas auparavant, même si quelques pangolins vivant au Laos ou au nord du Vietnam pouvaient déjà être consommés. La science a bien sûr besoin de travailler sur les génomes, mais aussi de comprendre les consommations d’animaux sauvages, les circuits commerciaux. Si le médical laisse tous ces domaines aux économistes, on ne comprendra pas ce qui se passe vraiment, et la médecine ne peut être efficace qu’avec une conception générale de la société, qui ne se limite pas à des données scientifiques.

Il semble qu’il y ait, en outre, un effet amplificateur de la réunion d’animaux sur les marchés, avec un effet de seuil, où la contagiosité n’est pas la même à partir d’un seuil de concentration qui reste à déterminer, mais qui montre une augmentation logarithmique du pouvoir de contamination, qui ne serait pas du tout le même selon qu’on parle de quelques individus en contact les uns avec les autres, ou de plusieurs centaines.

Comment considérez-vous la réponse française à cette épidémie ?

Le gouvernement actuel se situe à l’aboutissement d’une histoire qui remonte à plusieurs dizaines d’années. J’ai assisté depuis des années à une dégradation des capacités médicales de réponse hospitalière, des conditions d’enseignement, et à un abandon de la santé publique, dont le gouvernement d’Édouard Philippe n’est que l’héritier. La France, qui a été un grand pays de santé publique, a totalement abandonné ce regard sur la santé générale des populations, comme en témoigne le désintérêt total des étudiants pour cette discipline, que ne suivent que les moins bien notés. Même s’il y a d’excellents spécialistes individuels de santé publique, il n’y a pas d’école prestigieuse  qui attire les étudiants comme à Harvard où la santé publique est aussi renommée que la cancérologie ou l’immunologie. L’énergie créatrice qu’on trouve en cancérologie, en chirurgie ou en biologie moléculaire ne se dirige pas vers la vaccination, la gestion du sang, les problèmes d’alcool ou de tabac… Le « principe de précaution » a fini par servir de santé publique…

Je peux témoigner à ce sujet d’une expérience cruelle. En 2015, la Haute Autorité de santé m’a demandé de présider une conférence internationale sur la réduction des risques pour les usagers de drogues. C’était l’aboutissement d’un travail d’un an, avec une bibliographie exceptionnelle réalisée par l’Inserm. On a organisé des conférences pendant 48 heures au ministère de la santé, avec des experts venus du monde entier, qui avaient envoyé leurs papiers en amont. On s’est réuni avec un jury large composé de médecins, d’infirmiers, de policiers, d’usagers, d’associatifs, de juges… Et on a abouti à un rapport unanime de dix-huit pages demandant notamment l’abrogation de la loi de 1970 sur la criminalisation des drogues qui empêche les usagers de se rendre à l’hôpital et de mener une véritable politique de santé publique. Nous avons demandé la publication de ce rapport, mais la Haute Autorité de santé, alors dirigée par Agnès Buzyn, a simplement répondu : « Je ne cautionne pas vos conclusions. » Cela illustre l’indifférence à la santé publique dans notre pays, prise en tenaille entre les intérêts des différents lobbys et l’indifférence ou l’impuissance des ministères.

Cette dégradation de l’hôpital et de la santé publique n’est-elle liée qu’à des raisons budgétaires ?

Non ce n’est ni uniquement ni principalement un problème d’argent, comme le montre le fait qu’on dépense autant, voire plus, que l’Allemagne pour la santé. Le problème est plus profond. Depuis une quinzaine d’années, on a encouragé une économie hospitalière qui a engendré une rupture absolue entre les malades qui rapportent, comme ceux qui ont besoin de prothèses ou de chirurgie plastique, et ceux qui coûtent, comme les usagers d’alcool, de drogues, ou les malades chroniques et précaires. Les hôpitaux ont été pris, silencieusement et structurellement, au piège de se dire « si on ne prend pas les malades qui rapportent, nous n’allons plus être financés ». Et ils ont ainsi complètement négligé la santé publique.

Les variables d’ajustement ont été les salaires des infirmières, les recrutements, et l’ensemble du personnel hospitalier a l’impression que leurs structures ont oublié leur mission de service public. Ce découragement des médecins et des soignants n’est pas seulement lié aux politiques gouvernementales, mais aussi à la médecine elle-même, qui ne considère désormais comme noble que ce qui paraît scientifique. Beaucoup de médecins, passionnés par l’imagerie médicale, les prouesses du dernier scanner ou le décryptage d’un nouveau génome, n’ont plus guère d’intérêt pour l’examen clinique d’un patient, surtout si c’est un usager de drogue ou d’alcool. Cela se voit aussi dans la piètre estime dans laquelle la société tient les médecins généralistes, dont on n’attend guère qu’une prescription ou une orientation vers des médecins spécialisés, alors qu’ils possèdent une expertise unique. Beaucoup d’étudiants en médecine finissent leurs études sans avoir appris à examiner un malade en le touchant.

On n’est donc pas face à un problème politique ou budgétaire au sens courant du terme, mais face à un phénomène d’effondrement multifactoriel dont il serait trop facile de faire du gouvernement actuel le seul bouc émissaire. La responsabilité de la crise actuelle me semble partagée. Je ne me souviens pas avoir entendu beaucoup de médecins tirer la sonnette d’alarme sur le nombre de masques et de tests. Le problème fondamental est l’abandon de toute politique de santé publique générale.

Les relations entre l’exécutif et le monde scientifique vous paraissent-ils équilibrés ou repérez vous des défaillances d’un côté ou de l’autre ?

C’est très difficile, parce qu’il ne faut pas que le politique se fonde sur les médecins, car il perdrait alors en indépendance. Et la médecine n’est pas là non plus pour diriger le monde. La médecine au pouvoir, comme l’éthique au pouvoir, c’est une catastrophe. Il faut donc que les rapports soient étroits, que les conseils des scientifiques soient nombreux, mais je ne pense pas que le politique doive demander une sorte de tampon de validité aux médecins, et affirmer qu’il prend telle ou telle décision parce que médecine l’exige.

Le président de la République a annoncé un grand plan pour l’hôpital. Croyez-vous à un véritable retournement en matière de politique hospitalière ?

Oui, je pense qu’il y a une prise de conscience possible de la dégradation des réponses et de la souffrance vécue par les soignants. Le problème est que nous n’avons pas un organigramme de santé publique capable de reconstruire ce qui a été abîmé. On demande habituellement à des grands spécialistes de telles ou telles maladies de donner des conseils ou de faire des rapports. Et la question de savoir qui on soigne risque à nouveau de primer sur celle de savoir pourquoi et comment on soigne. La France est sans doute le paradis du soin quand on est un grand malade atteint d’un cancer par exemple. Mais elle fait l’impasse totale sur le tissu social de la morbidité, sur la précarité qui prédispose aux maladies, sur les handicaps… Les phares demeurent braqués sur les grands médecins qui s’intéressent aux grandes maladies et aux grands malades, tandis que celles et ceux qui se concentrent sur la santé publique ne sont considérés que comme des rêveurs ou des humanitaires.

Paradoxalement, dans la situation actuelle, les médecins hospitaliers ont toutefois retrouvé une forme de pouvoir, dans le sens noble du terme…

Oui, pour la raison simple qu’ils se sont retrouvés à faire l’essence de leur métier, à savoir être au plus près des malades, contourner la mort, dans une situation où chaque geste peut sauver une vie ou ne pas y parvenir. Dans ce contexte, on ne se pose plus la question de savoir si les malades rapportent ou pas, s’ils sont riches ou pauvres, utiles ou non ; et on chasserait à coups de savates le directeur financier de l’hôpital qui viendrait faire sa visite dans les services.

Le pouvoir administratif à l’hôpital est devenu tel qu’il en vient à angoisser les médecins. Lorsque j’étais chef de service à l’hôpital Cochin, je m’inquiétais déjà de dépenser trop d’argent pour tel ou tel malade, je me demandais si le but de l’hôpital était compatible avec celui de tel ou tel malade. Aujourd’hui, la détresse est bien pire et le sentiment de perte de sens tel que beaucoup de mes collègues me disaient ces derniers temps : « Tu as de la chance d’être à la retraite, tu ne supporterais plus l’atmosphère. »

Qu’est-ce que le Laos, où vous avez pratiqué la médecine et contribué à la mise en place de l’antenne de l’Institut Pasteur, vous a appris ?

Cela m’a appris que, lorsqu’on ne dispose pas de moyens d’investigations sophistiqués, il faut s’intéresser aux gestes quotidiens, à la vie des gens, aux comportements… Quand j’étais médecin là-bas, j’avais pu ainsi mettre en évidence une épidémie de béribéri en observant comment les gens cuisaient le riz.

À Vienne, au milieu du XIXe siècle, Ignace Semmelweis, qui était alors un jeune étudiant en médecine, avait observé que, dans un service d’accouchement, près de 20 % des femmes mouraient en couches, tandis qu’elles n’étaient que 2 % dans un autre hôpital. Sans connaître la théorie microbienne, il avait fait le lien avec le fait que, dans un service, des étudiants en médecine venaient aider à l’accouchement, ce qui n’était pas le cas dans l’autre. Or ces étudiants faisaient des autopsies le matin et transmettaient ainsi des maladies l’après-midi. Semmelweis a été précurseur dans le lavage des mains, mais il était alors regardé de haut par les médecins qui avaient un souverain mépris pour ces questions paraissant peu scientifiques. L’observation globale demeure pourtant la base de tout travail médical.

Vous avez plaidé pour la création d’un tribunal sanitaire international : de quoi s’agirait-il ?

Je ne suis pas constitutionnaliste, mais je pense que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) n’a pas les capacités de faire quoi que ce soit, parce qu’elle est dans la main des États. J’en ai fait l’expérience directe il y a quarante ans. Le docteur Hiroshi Nakajima, qui dirigeait alors l’institution, cherchait un médecin pour enquêter sur les médecins aux pieds nus en Chine. Mon tropisme asiatique m’a ainsi amené à me retrouver à passer deux mois dans un petit village près de Shanghai, où j’ai pu regarder ces jeunes gens, formés en quelques mois, injecter de la cortisone à la moindre poussée de fièvre – un médicament qui fonctionne bien à court terme – à l’aide de seringues non stérilisées, et en transmettant ainsi des hépatites B ou C.

Quand j’ai fait mon rapport final à l’antenne de l’OMS à Manille, qui était alors dirigée par un Chinois, j’ai donc expliqué que ces jeunes gens étaient utiles pour prodiguer des soins primaires, mais qu’ils ne devaient pas faire des injections sans avoir davantage de bases médicales, et on m’a alors indiqué qu’il était totalement inenvisageable de rédiger un tel rapport.

Quelles que soient les qualités des gens qui travaillent à l’OMS, cette organisation ne peut déplaire aux États qui la composent et la financent, et donc apporter les informations et engager les actes nécessaires. Je plaide donc pour une structure internationale, comme on l’a fait pour l’Iran sur le nucléaire, avec des contrôles de spécialistes indépendants. À la moindre alerte de spécialistes, une task force internationale pourrait intervenir et, si besoin, transférer les dossiers à une haute cour internationale. Le globe terrestre tel qu’il existe a besoin d’une structure supranationale qui fasse autorité, si l’on ne veut pas que les épidémies de ce type se multiplient dans le futur.

En tant qu’ancien président du Comité consultatif national d’éthique, jugez-vous que nous sommes confrontés à des défis éthiques inédits, et si oui lesquels ?

Non. Après mon départ du comité, mon successeur a rendu un excellent avis sur les épidémies, au moment de la grippe H1N1. Pour ce qui est de l’accompagnement dans la mort, je pense que nous sommes face à des questions éternelles. Ce qui est sans doute inédit, c’est le confinement à une échelle telle, lié au fait qu’on a été pris de court, par manque de moyens de prévention et de moyens thérapeutiques, mais qui pose à mon avis davantage de problèmes politiques et psychologiques que de questions éthiques.

Comment considérez-vous la réponse française à cette épidémie ?

Le gouvernement actuel se situe à l’aboutissement d’une histoire qui remonte à plusieurs dizaines d’années. J’ai assisté depuis des années à une dégradation des capacités médicales de réponse hospitalière, des conditions d’enseignement, et à un abandon de la santé publique, dont le gouvernement d’Édouard Philippe n’est que l’héritier. La France, qui a été un grand pays de santé publique, a totalement abandonné ce regard sur la santé générale des populations, comme en témoigne le désintérêt total des étudiants pour cette discipline, que ne suivent que les moins bien notés. Même s’il y a d’excellents spécialistes individuels de santé publique, il n’y a pas d’école prestigieuse  qui attire les étudiants comme à Harvard où la santé publique est aussi renommée que la cancérologie ou l’immunologie. L’énergie créatrice qu’on trouve en cancérologie, en chirurgie ou en biologie moléculaire ne se dirige pas vers la vaccination, la gestion du sang, les problèmes d’alcool ou de tabac… Le « principe de précaution » a fini par servir de santé publique…

Je peux témoigner à ce sujet d’une expérience cruelle. En 2015, la Haute Autorité de santé m’a demandé de présider une conférence internationale sur la réduction des risques pour les usagers de drogues. C’était l’aboutissement d’un travail d’un an, avec une bibliographie exceptionnelle réalisée par l’Inserm. On a organisé des conférences pendant 48 heures au ministère de la santé, avec des experts venus du monde entier, qui avaient envoyé leurs papiers en amont. On s’est réuni avec un jury large composé de médecins, d’infirmiers, de policiers, d’usagers, d’associatifs, de juges… Et on a abouti à un rapport unanime de dix-huit pages demandant notamment l’abrogation de la loi de 1970 sur la criminalisation des drogues qui empêche les usagers de se rendre à l’hôpital et de mener une véritable politique de santé publique. Nous avons demandé la publication de ce rapport, mais la Haute Autorité de santé, alors dirigée par Agnès Buzyn, a simplement répondu : « Je ne cautionne pas vos conclusions. » Cela illustre l’indifférence à la santé publique dans notre pays, prise en tenaille entre les intérêts des différents lobbys et l’indifférence ou l’impuissance des ministères.

Cette dégradation de l’hôpital et de la santé publique n’est-elle liée qu’à des raisons budgétaires ?

Non ce n’est ni uniquement ni principalement un problème d’argent, comme le montre le fait qu’on dépense autant, voire plus, que l’Allemagne pour la santé. Le problème est plus profond. Depuis une quinzaine d’années, on a encouragé une économie hospitalière qui a engendré une rupture absolue entre les malades qui rapportent, comme ceux qui ont besoin de prothèses ou de chirurgie plastique, et ceux qui coûtent, comme les usagers d’alcool, de drogues, ou les malades chroniques et précaires. Les hôpitaux ont été pris, silencieusement et structurellement, au piège de se dire « si on ne prend pas les malades qui rapportent, nous n’allons plus être financés ». Et ils ont ainsi complètement négligé la santé publique.

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