Quand les difficultés s’accumulent, le moral des chefs d’entreprise est mis à rude épreuve. Face à la souffrance psychique des dirigeants, des dispositifs existent qui visent à repérer et éviter le geste suicidaire.
En France, le phénomène des suicides liés au travail reste peu documenté, si ce n’est pour certaines professions. C’est le cas des exploitants agricoles, chez lesquels on dénombre un suicide tous les deux jours.
« Néanmoins, malgré l’absence de chiffres et même si le suicide n’a pas une cause unique, on sait que les chefs d’entreprise constituent une population exposée aux idées suicidaires, notamment les dirigeants de PME-PMI, car ils cumulent plusieurs facteurs de risque », indique Jean-Luc Douillard, psychologue clinicien et cofondateur du dispositif Apesa (Aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aigüe).
Les dirigeants investissent en effet beaucoup de leur temps – ils travaillent en moyenne 52 heures par semaine contre 37 heures pour les salariés – parfois leur patrimoine financier et sont multitâches. « Ils gèrent à la fois le personnel, la comptabilité, les investissements, etc. La charge de ces responsabilités occasionne une pression quotidienne et un stress constant », précise l’expert.
Quelles sont les situations critiques où le risque suicidaire augmente ?
« La santé du dirigeant est directement liée à la santé de son entreprise », poursuit Jean-Luc Douillard, psychologue clinicien et cofondateur du dispositif Apesa.
Autrement dit, lorsque des difficultés apparaissent et/ou s’accumulent – un client important qui part à la concurrence, un conflit avec un salarié, la perspective d’un redressement judiciaire, etc. – la charge psychologique s’amplifie et la capacité du dirigeant à faire face est fragilisée.
S’ajoutent parfois des problèmes personnels (un divorce, un deuil, etc.) qui alourdissent encore la situation.
« Les difficultés dans la sphère privée peuvent envahir largement la sphère professionnelle et impacter les capacités de travail. De même que les problèmes au travail impactent la vie personnelle… », remarque Fabrice Jollant, psychiatre et auteur de Le suicide : comprendre pour aider l’individu vulnérable, (éd. Odile Jacob).
« Il faut comprendre que la crise suicidaire est l’aboutissement d’un processus, explique Jean-Luc Douillard. Au départ, l’individu cherche des solutions pour résister à l’angoisse générée par la situation. Mais quand la situation dure et que les solutions s’épuisent, sa capacité de penser se réduit. Apparaît alors un état de déprime qui peut conduire, s’il n’est pas pris en charge, à un passage à l’acte. »
« Au-delà des événements de vie, rappelons que l’un des principaux facteurs de risque suicidaire est la dépression », souligne Fabrice Jollant. Près de 70 % des personnes qui décèdent par suicide souffraient en effet d’une dépression, bien souvent non diagnostiquée ou non traitée.
« Les problèmes d’alcool constituent aussi un facteur de risque majeur, note l’expert. Car ils alimentent les problèmes de santé mentale et facilitent les passages à l’acte. »
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Lire la suite, « Quels sont les signaux à ne pas négliger ?« , « Comment agir pour stopper le risque suicidaire ?« , « Côté entourage, quels réflexes adopter ?« , « Qui peut se former et devenir « sentinelle » au sein du réseau Apesa ?« , sur le site Harmonie Santé.
En lire plus sur le suicide des chefs d’entreprise :
- Les risques psychosociaux du dirigeant de PME : typologie et échelle de mesure des stresseurs professionnels – Une étude de la revue Érudit
- Épuisement professionnel et ras-le-bol du dirigeant de PME…
- La souffrance au travail des patrons de PME
- Entre déni des entreprises et manque de données, l’invisibilisation des suicides liés au travail
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