En annonçant vouloir « mettre fin à l’absentéisme maladie », le 19 juin dernier [2023] à l’occasion des Assises des finances publiques, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a oublié que l’augmentation des arrêts de travail était, en réalité, un phénomène inévitable. Elle est d’abord la conséquence de la progression du taux d’emploi ainsi que du recul de l’âge de la retraite.
Ce constat n’est pas nouveau. Déjà, en 2019, un rapport de trois experts, commandé par le Premier ministre, Édouard Philippe, le pointait. « Plus le nombre de travailleurs est élevé, plus le nombre de personnes susceptibles d’être en arrêt de travail est élevé. A l’inverse, la hausse du taux de chômage a un effet amplificateur sur la baisse du nombre d’indemnités journalières de courte durée », pouvait-on lire dans le document. De même, « le vieillissement de la population est un facteur clé puisque la durée des arrêts augmente avec l’âge ». Selon la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), citée dans ce rapport, « les personnes de 50 ans et plus représentent 1,45 million de bénéficiaires mais 3,1 milliards d’euros des montants indemnisés, en raison d’une durée moyenne d’arrêt maladie qui augmente avec l’âge ».
Explosion des risques psychosociaux
Faire la chasse aux abus en sanctionnant les médecins prescripteurs risque donc d’être aussi efficace qu’un cautère sur une jambe de bois. Ne serait-il pas plus judicieux de prévenir le risque de désinsertion professionnelle par la promotion d’un travail soutenable tout au long de la carrière professionnelle et de faciliter le retour le plus précoce possible dans l’emploi des salariés en arrêt prolongé ? Très souvent, l’intensification du travail, les effectifs calculés au plus juste, les contraintes de temps et de délais conduisent à la réintégrer des salariés pas encore complètement guéris. Or, dans de nombreux secteurs professionnels, on est encore loin de pouvoir aménager des situations de travail afin que la maladie et les traitements qui l’accompagnent n’interdisent ni la poursuite du parcours professionnel, ni l’épanouissement et l’efficience au travail.
Faciliter le retour d’un salarié après une longue absence est un enjeu important aussi bien pour la personne que pour l’entreprise ; cela conduirait nécessairement à une amélioration des conditions de travail et de l’organisation au bénéfice de tout le monde, malades et valides.
Une autre cause de l’augmentation des arrêts de travail, qui a visiblement échappé au gouvernement, est celle de l’explosion des risques psychosociaux (RPS) dans les entreprises comme dans les trois fonctions publiques. Selon l’observatoire de l’absentéisme conduit par l’assureur Axa, « les risques psychologiques restent la première cause d’arrêt de travail de longue durée : ils représentent 22,2 % des arrêts survenus en 2022 ». Est également notée une hausse inédite des arrêts de travail chez les moins de 30 ans et chez les cadres, des populations généralement peu réputées pour abuser de l’absentéisme maladie. Et Axa de relever les enjeux de la prévention des atteintes à la santé mentale.
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Lire la suite de l’article de François Desriaux sur le site Santé & Travail : « S’attaquer à l’organisation du travail«
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