À la suite de deux suicides survenus à France Télévisions en 2013, la direction et trois syndicats ont commandé un rapport à un cabinet d’experts. « Marianne », qui publie dans son numéro toujours en kiosques une longue enquête sur le « naufrage » du groupe audiovisuel public, se l’est procuré dans sa version intégrale, et a décidé d’en publier de larges extraits sur Internet. Un document édifiant.
Les 132 pages du rapport du sociologue Henri Vacquin, du cabinet Technologia, sont accablantes. Le document, barré d’un titre à rallonge («Prévention et qualité de vie au travail au sein du groupe France Télévisions : diagnostic socio-organisationnel et panorama des risques psychosociaux et de la qualité de vie au travail»), jette une lumière crue sur les difficultés et les souffrances des salariés depuis la fusion de la télé publique en une seule entité sociale. À la lecture de ce rapport, on découvre une véritable Berezina managériale.
Interrogé par Marianne, Patrice Papet, le DRH du groupe France Télévisions rappelle «avoir fait appel à un sociologue qui n’était pas susceptible d’être complaisant. Après plusieurs alertes en région, il ne fallait pas mégoter sur les moyens. Si la direction, comme les syndicats, ont exprimé des réserves sur le résultat final, nous sommes plutôt d’accord sur l’analyse générale, même si c’est donc sans complaisance…»
Peut-être d’accord, mais la direction de France Télévisions, après avoir commandé ce rapport, s’est retrouvée bien embêtée : alors qu’elle avait annoncé dans un premier temps vouloir rendre accessible ce rapport auprès de l’ensemble des salariés du groupe public, une simple synthèse de quelques pages fut diffusée, expurgée de nombreux faits et éléments d’analyse.
C’est pourquoi Marianne, en complément du dossier de huit pages consacré à France Télévisions dans notre numéro en kiosques cette semaine, a décidé d’en publier de larges extraits sur Internet.
Au sujet de la fameuse «entreprise unique» contestée en interne et mise en place après 2008, Patrice Papet a d’ailleurs une analyse étonnante, teintée de mea culpa : «Cette réorganisation-fusion a été conduite d’une façon brutale suite à une décision politique. Quand notre équipe est arrivée, nous étions placés devant une décision que nous avons décidé d’assumer sans forcément y adhérer entièrement, alors qu’une partie des salariés attendait qu’on revienne sur la décision. Et ce fut très difficile de construire une fonction ressources humaines de groupe tout en gérant la réorganisation. S’il était pertinent de mettre fin au syndrome du village gaulois entre les chaînes du groupe, il n’était pas pertinent de mettre en œuvre cette réforme d’un seul coup dans un temps si court. Nous sommes victimes des changements de cap incessants de la part de l’actionnaire. Que l’Etat laisse l’entreprise agir !»
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Lire les extraits du rapport sur le site de Marianne