«Allô le ministère, c’est pour un accident» : un prof d’histoire recense tous les morts au travail

21 janvier 2020 | Stress Travail et Santé

Depuis trois ans, le professeur d’histoire Matthieu Lépine alerte le gouvernement sur le nombre de morts au travail. Un chiffre qui peine à baisser.

Un ouvrier chutant d’un toit, un livreur à vélo renversé par une voiture, un mécanicien brûlé lors d’une réparation… En 2019, les morts au travail se comptent toujours par centaines. 412 personnes seraient mortes cette année-là en exerçant leur métier, selon un décompte minutieux tenu par Matthieu Lépine, professeur d’histoire en collège à Montreuil (Seine-Saint-Denis).

L’idée de recenser ces accidents du travail – graves et mortels – lui a pris un jour de janvier 2016, après des propos d’Emmanuel Macron, à l’époque ministre de l’Économie. Vantant les mérites du patronat, le ministre soutenait sans ambages sur BFMTV que « la vie d’un entrepreneur est bien souvent plus dure que celle d’un salarié ». Et d’ajouter : « Il peut tout perdre, lui, et il a moins de garanties. »

Interpellé par ces mots, le professeur se lance aussitôt dans des recherches, lit la presse régionale, recense les cas d’accidents. « À ce moment-là, je n’avais pas de lien particulier avec le sujet, mais je voulais prendre Macron au mot. Je voyais passer tous les jours des articles très courts, souvent des brèves, sur des morts au travail. J’ai commencé à les comptabiliser de façon un peu irrégulière et à les partager sur une page Facebook. »

Des accidents passés sous silence

Les mois défilent et la liste s’allonge. Début 2019, Matthieu Lépine lance finalement un compte Twitter (@DuAccident) et décide de recenser quotidiennement tous les cas publiés dans la presse. Des inconnus lui écrivent également, révélant certains accidents passés sous silence ou survenus au sein de leur entreprise comme dans leur famille.

« Une mère m’a contacté après la mort de son fils de 17 ans survenue lors de son stage. Il était apprenti bûcheron. Elle ne trouvait pas normal qu’aucun représentant de l’Etat ne l’ait contactée, après ce drame. Depuis, elle se bat pour qu’une enquête soit ouverte afin de connaître les circonstances de la mort de son fils », raconte l’enseignant. Touché par cette énième mort qui n’a pas fait de bruit, Matthieu rend hommage au jeune garçon à travers un portrait publié sur son blog.

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