Quand Amazon s'arrange avec les accidents de travail

Stress Travail et Santé

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Deux rapports de la médecine du travail pointent des nouveaux errements de la multinationale sur les conditions de travail dans ses entrepôts. Amazon est aussi accusée de fraude dans le but d’améliorer ses statistiques d’accidents du travail. La CGT appelle à la grève mardi 26 mai.

Devant l’écran, on admire le champion de l’innovation: des drones pour la livraison, une application en test pour livrer des biens de consommation courante en une heure à peine ou même des taxis qui livrent les colis commandés. Un groupe qui en vingt ans n’a cessé de croître pour réaliser en 2014, des ventes de 89 milliards de dollars (+20%). Mais l’an dernier, ses comptes ont affiché une perte de 241 millions contre un bénéfice de 274 millions en 2013.
De l’autre côté du miroir, l’image est écornée. En 2012, le fisc français réclame 200 millions d’euros en arriérés d’impôt et pénalités pour les années 2006 à 2010. Il reproche à la multinationale ses pratiques fiscales en ayant implanté son siège européen au Luxembourg et du coup de payer peu d’impôts en France.
Coté social, Amazon fait aussi des vagues sur les conditions de travail de ses employés (2500 CDI en France). Plusieurs enquêtes ont déjà été réalisées et deux nouvelles preuves viennent s’ajouter à l’épais procès fait au groupe américain. Le Figaro s’est procuré le rapport de la médecine du travail dans l’entrepôt de Saran (Loiret). Ce dernier fait apparaître le constat suivant: sur 901 salariés, 737 sont jugés «aptes» mais 175 sont déclarés «aptes avec restriction médicale». Selon la définition du code de travail, ces restrictions peuvent viser certaines tâches comme le port de charges lourdes ou des situations de travail particulières (travail en hauteur, travail en milieu confiné ou travail de nuit). Dans ces conditions, l’employeur est tenu de prendre en considération ses conclusions. Dans un autre rapport dévoilé en début de semaine par l’Humanité, un peu moins de 20% des salariés (51 personnes sur 280) présentent des «troubles musculo-squelettiques» (TMS) au sein de l’entrepôt de Sevrey (Saône-et-Loire). Présenté en comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), le rapport de la médecine du travail a provoqué un tollé. Aujourd’hui, la pression en terme de productivité est telle que la succession de gestes joue sur les muscles, qui restent en activité constante.
Des conseillers régionaux de Bourgogne demandent des comptes
Mais l’Humanité évoque aussi une affaire de fausse déclaration d’accident du travail envoyée à la Sécurité sociale. Dans son article, le quotidien rend compte d’une fraude alors répréhensible par la loi: la modification d’une déclaration liée à un accident du travail sur le site de Sevrey pour doper les statistiques du groupe. Cette faute, si elle est avérée après enquête, pourrait faire largement changer les choses pour les employés français d’Amazon. «Jusqu’ici, l’Inspection du travail ne pouvait rien faire car il était impossible de constater un manquement au code du travail. Aucun PV ne pouvait être établi et la multinationale jouait là-dessus», confie au Figaro le conseiller régional PCF de Bourgogne, Patrick Blin, également président de la commission ad hoc «Suivi et recommandation des aides économiques» de la région. «Depuis le début, les choses ne se sont pas améliorées, voire se sont détériorées. Maintenant, on va travailler pour faire bouger les choses».
L’employé en question raconte à l’Humanité être «allé consulter son médecin traitant» car une douleur à la jambe lui paraissait anormale. Après auscultation, ce dernier lui a diagnostiqué «une paralysie du sciatique poplité externe» en considérant qu’il s’agissait alors d’un accident du travail. De retour à l’entrepôt, l’homme explique s’être heurté à des managers qui lui assurent que sa blessure ne représente en rien un accident du travail et que son médecin «n’y connaît rien».
Interrogé par Le Figaro, Ronan Bolé, le directeur du site de Sevrey, affirme que «les faits relayés sont faux. Je n’ai pas envie d’aborder les cas particuliers. Amazon est très attaché au bien être de ses salariés et il existe un véritable suivi personnalisé, un système d’interview pour connaître exactement les circonstances lors d’un éventuel accident».
De son côté, le conseiller régional Patrick Blin et ses équipes rassemblent les preuves pour demander des comptes à l’entreprise. Un combat partagé par Nathalie Vermorel, secrétaire départemental du PCF de Saône-et-Loire et conseillère régionale de Bourgogne, qui affirme «vouloir interpeller la région» et demander à «l’État de pousser l’enquête». La Région se dit prête à demander le remboursement des subventions versées en cas de manquement grave au droit du travail. A ce jour, Amazon a déjà reçu 80% d’une enveloppe globale de 1,5 million d’euros.

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