Dans son allocution du lundi 17 avril [2023], Emmanuel Macron reconnaissait une crise des services publics, qui ne donneraient plus, selon lui, satisfaction aux Français. Notre modèle historique du service public est-il menacé ? Comment le transformer tout en préservant le lien avec les territoires ?
Avec
- Christian Authier, écrivain, auteur de Poste restante, aux éditions Flammarion.
- Julie Gervais Maîtresse de conférence en science politique à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne
École, Poste, hôpital, ou encore transports, tous nos services publics semblent aujourd’hui en crise. Comment les réformer ?
Quel avenir pour La Poste ?
Comment voir l’avenir de La Poste ? “La raison me conduirait à le voir de manière plutôt sombre, répond Christian Authier, qui publie Poste restante aux éditions Flammarion. C’est-à-dire que l’on peut craindre qu’elle aille vers une “modernisation à marche forcée. »
Pour lui, « une politique de modernisation des bureaux de poste est en effet à l’œuvre et est révélatrice des tendances à au sein de La Poste, mais plus largement dans notre société. Il y a une place croissante accordée à la numérisation des services qui nuit à la présence humaine. On appelle ça « l’autonomisation de l’usager » dans le langage communicationnel de La Poste. Le cœur me pousse cependant à ne pas désespérer jusqu’au bout. J’espère que l’on continuera à écrire des lettres et à envoyer des cartes postales. Cela sera un petit acte de résistance qui est à la fois ludique et utile. »
Des services publics : une “situation préoccupante” et des “services dégradés”
Concernant l’état de nos services publics, de l’école, des hôpitaux et des transports, l’historienne Claire Lemercier, explique que “du côté des agents publics, ce qui domine, c’est la souffrance au travail du fait que ces derniers sont empêchés de bien faire leur travail. »
Dans le même temps, les dépenses publiques ont explosé. Elles sont passées de 800 milliards à environ 1500 milliards d’euros. Sur ce point, Claire Lemercier relève que “la dépense publique ne va pas que dans les services publics, l’argent public va aussi dans les aides aux entreprises, certaines étant justifiées sans doute, d’autres moins, car sans contreparties. L’autre chose est qu’il y a un mal-être des agents du services publics lié à l’accélération des réformes que l’on enchaîne sans jamais en faire le bilan et dont les objectifs sont tout à fait décalés par rapport à ce qui correspondrait à de meilleurs services publics reconnus par la population”.
A quoi servent ces réformes ? Que visent-elle ? « Elles visent des objectifs extrêmement abstraits, explique l’historienne. Une conception hors-sol de l’efficacité du bon management et des conceptions qui sont censées s’appliquer également dans tous les services publics et qui sont de plus en plus décidées par des individus qui ne connaissent pas réellement les secteurs qu’ils réforment ou dirigent”.
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