Invitée d’Europe 1 samedi, Marielle Dumortier, médecin du travail et autrice du livre Le monde du travail est devenu fou, a demandé aux entreprises de « remettre l’homme au centre des préoccupations » afin d’éviter la souffrance au travail. Selon elle, ces dernières ont tendance à « reporter la faute sur le salarié ». INTERVIEW
Marielle Dumortier, médecin du travail depuis 1985 et autrice du livre Le monde du travail est devenu fou était l’invitée d’Europe 1 samedi pour parler de la souffrance au travail, encore augmentée en cette période particulière de crise sanitaire. Elle demande aux entreprises de prendre leurs responsabilités dans le problème, alors qu’elles ont tendance à « reporter la faute sur le salarié ». Celle qui consulte à l’hôpital de Créteil en souffrance au travail rappelle qu' »un infarctus du myocarde sur deux est dû à des facteurs de stress ».
« Remettre l’Homme au cœur des préoccupations »
« Arrêtez de dire aux salariés « aidez-vous vous-mêmes à gérer votre stress« , demande la médecin du travail, qui a recueilli pour son ouvrage de nombreux témoignages de salariés en souffrance. Selon elle, ce sont aux entreprises de « donner de bonnes conditions de travail à tous les salariés pour que, justement, ils ne puissent pas rentrer dans la maladie. Et il ne faut pas reporter la faute sur le salarié. »
S’il y avait une solution, ce serait, dit-elle, de « remettre l’Homme au centre des préoccupations dans l’entreprise ». La médecin demande aussi d' »arrêter de faire peur aux gens, par cette espèce de crainte de guerre économique avec ses conséquences que sont la perte de l’emploi. Nous, médecins du travail, on est toujours en train de gérer à la fois les conséquences médicales, mais aussi sociales de toutes ces conditions de travail », déplore Marielle Dumortier.
« Anxiétés pathologiques » liées au Covid
D’autant que la crise du coronavirus n’arrange rien. « Cela rajoute en termes d’angoisse, de contraintes, avec les entreprises qui ont dû organiser à la va-vite le télétravail », avec à la clef « la perte de frontière entre la vie privée et la vie professionnelle » et des problèmes « purement matériels d’organisation » liés à l’espace. Des salariés ont été, confie-t-elle, « obligés de se mettre sur la table à repasser ou sur leur lit, et la charge des enfants à gérer ». « Nous avons vécu, nous autres médecins du travail, toutes les angoisses dues au retour dans l’entreprise avec la peur de la maladie, avec des salariés qui étaient tombés vraiment dans des anxiétés pathologiques. »
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